" Mozzarella, une vaste bufflonnerie ? ", sur France 5 : le pire et le meilleur d’un fromage " pâte à modeler "

May 23, 2023
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Antonio Palmieri, producteur de mozzarella de bufflonne, dans le documentaire « Mozzarella, une vaste bufflonnerie ? », de Mathieu Barrère. AUXYMA

FRANCE 5 − MARDI 23 MAI À 21 H 00 − DOCUMENTAIRE

Il fut un temps, pas si ancien, où les Français ne connaissaient ni les sushis japonais ni la mozzarella italienne. Cette dernière est pourtant devenue une invitée régulière de nos tables, fraîche ou, plus volontiers, fondue sur les pizzas. On la trouve dans les supermarchés, sous diverses formes, à divers prix, ainsi que l’explique Mozzarella, une vaste bufflonnerie ?, de Mathieu Barrère.

Le titre du documentaire annonce la couleur : rares sont les produits vendus par la grande distribution à satisfaire aux exigences d’une mozzarella fabriquée dans les règles de l’art. Pour obtenir le label Dénomination d’origine protégée (DOP, équivalent de l’AOP en France), il faut respecter trois règles : être fabriqué à base de lait de bufflonne (le jeu de mots du titre s’éclaire), être façonné à la main et dans la région de la Campanie, dans le sud-ouest de l’Italie.

La version au lait de vache, la plus courante, n’est pas soumise à la DOP et son prix au kilo peut être quatre fois moins élevé que celui de la mozzarella au lait de bufflonne. Et l’on trouve des boudins ou pavés de mozzarella industrielle, emballés à sec, utilisés pour leurs qualités « filantes » et non pour leur goût, ainsi que le dit le responsable d’une usine belge entièrement robotisée.

L’« étirabilité » de ce succédané − auquel sont ajoutés acide citrique, stabilisants, épaississants − a son importance, ainsi que le démontre une employée : moyenne de 30 centimètres, mais cela peut aller jusqu’à… 1 mètre, qualité très appréciée dans le domaine de la pizza. Ainsi que le dit le commentaire en voix off, ce produit finit par être « la pâte à modeler de l’agroalimentaire »…

Ersatz végétal

Le chef étoilé Thierry Marx trouve le goût de la mozzarella assez plat (c’est discutable), mais ajoute qu’elle « procure du plaisir par sa texture ». Et de la réinventer, face caméra, à l’aune de la cuisine moléculaire, en la faisant fondre avant de la passer au siphon afin de déstructurer-restructurer une tomate-mozzarella dans une sphère d’eau de tomate gelée à l’azote liquide et parsemée de poudre de pépins…

Le film s’arrête sur une production italienne de mozzarella noire, colorée au charbon végétal (censée être plus digeste), et sur un ersatz végétal proposé par un atelier de « cuisine responsable » français, fabriqué à base de lait de noix de cajou fermenté, épaissi, monté comme une sorte de béchamel et rafraîchi dans un bain de glaçons.

Instructif, le documentaire est pourtant incomplet : rien n’est dit sur des productions artisanales de haute qualité comme on en trouve même en France. Le magazine « Très très bon » du 18 avril 2021, sur Paris Première, leur avait consacré un numéro spécial made in France avec dégustation par des spécialistes, dont l’indispensable Alessandra Pierini.

Mozzarella, une vaste bufflonnerie ?, documentaire de Mathieu Barrère (Fr., 2023, 50 min).

Source: Le Monde