Rassemblement national : Tout comprendre à l’affaire de Marine Le Pen et du prêt russe

May 24, 2023
446 views

C’est l’occasion de répondre aux accusations pour Marine Le Pen. La cheffe de file du groupe parlementaire Rassemblent nationale (RN) à l’Assemblée nationale est entendue mercredi après-midi par la commission d’enquête parlementaire sur les ingérences étrangères. L’audition concerne le prêt russe dont a bénéficié le parti d’extrême droite en 2014. Une commission lancée par son groupe parlementaire, afin, notamment, de couper court aux accusations faisant du parti d’extrême droite un agent de l’influence russe en France. 20 Minutes vous résume l’affaire.

De quoi parle-t-on ?

Nous sommes deux ans après l’élection de François Hollande et l’échec de Marine Le Pen à se hisser au-delà des 18 % de suffrages. A l’époque, en 2014, le Rassemblement national s’appelait encore le Front national et n’a pas encore réussi son pari de la dédiabolisation de façade. Il est difficile, selon les explications des cadres du parti de se relever de cette défaite et de trouver des financements, surtout auprès des banques françaises et occidentales. C’est pourquoi, Marine Le Pen se tourne vers une autre solution. « Nous ne pouvions trouver que du côté chinois, de l’Iran, ou la Russie : Marine Le Pen a considéré que la Russie était ce qu’il y a de mieux », a ainsi affirmé à la commission d’enquête parlementaire Jean-Luc Schaffhauser, ancien eurodéputé FN, le 4 mai dernier.

Un prêt de 9,4 millions d’euros a finalement été conclu en 2014 avec une banque tchéco-russe, dont la créance a été reprise par diverses sociétés à la suite de faillites en cascade, toujours en cours de remboursement.

Pourquoi ce prêt pose-t-il un problème ?

Seulement voilà. Vladimir Poutine, déjà à l’époque, est un dirigeant peu fréquentable. Il vient d’annexer de force la Crimée ukrainienne et mène une guerre dans le Donbass aux côtés des séparatistes prorusses. La question est de savoir si ce prêt a été accordé au parti d’extrême droite avec des contreparties ou pression politique. C’est en tout cas ce dont est accusée Marine Le Pen par ses opposants politiques, et en premier lieu Emmanuel Macron. Dernier exemple en date : lors du dernier débat de l'entre-deux-tours de la campagne présidentielle, le président candidat à sa réélection avait estimé que la candidate d’extrême droite parlait « à [son] banquier quand elle parle de la Russie. »

Lors de son audition début mai, Jean-Luc Schaffhauser a, de son côté, assuré que ce prêt n’avait pas engendré de demandes de contreparties politiques. « Si j’avais senti une pression politique, nous aurions trouvé une autre solution », a-t-il insisté. Alors interrogé sur le « hasard » entre « la prise de position de Marine Le Pen en faveur de l’annexion russe de la Crimée et, quelques semaines plus tard, le fait qu’il y ait un emprunt qui se réalise », l’ex-eurodéputé a éludé en faisant valoir que celle qui était alors présidente du parti « connaissait son histoire. »

Pourquoi cette commission d’enquête ?

Les critiques des adversaires politiques du RN ont poussé le groupe parlementaire porté par Marine Le Pen à lancer la commission d’enquête fin 2022, précisément pour tenter de couper court aux accusations. Le président de cette commission est d’ailleurs le député RN Jean-Philippe Tanguy. Les autres camps dénoncent alors une « diversion » du Rassemblement national. Après l’audition de Jean-Luc Schaffhauser il y a vingt jours, la majorité macroniste et notamment la rapporteure de la commission d’enquête, la députée Renaissance Constance Le Grip, a décidé de convoquer la principale intéressée en personne. « On a dit dès le début que Marine Le Pen serait à la disposition de la commission d’enquête, on n’a pas changé d’avis », a alors rappelé Jean-Philippe Tanguy, en estimant toutefois « qu'aucun fait nouveau mis en lumière par les précédentes auditions ne justifie cette audition. »

L’audition de la candidate malheureuse à trois élections présidentielles est prévue à 14 heures. Jean-Philippe Tanguy déléguera la présidence de la commission, probablement au député Modem Laurent Esquenet-Goxes, l’un des vice-présidents de la commission. La parole sera donnée à tous les membres de la commission et, si le temps le permet, à deux députés représentant les groupes communiste et Liot (indépendants). Le rapport de la commission doit être rédigé le 26 mai et ses conclusions présentées officiellement début juin.

Qu’a-t-on appris de l’audition de Jean-Luc Schaffhauser ?

Lors de son audition, l’ancien eurodéputé, s’est revendiqué comme un « grand connaisseur de la Russie », partisan d’une « Europe chrétienne jusqu’à l’Oural », membre de l’Opus Dei, soutien de Bachar al-Assad mais pourfendeur des Etats-Unis et du protestantisme « fondé sur l’argent. » Ses réponses ont parfois dérouté les membres de la commission, jusqu’au RN Jean-Philippe Tanguy, soucieux de souligner que les convictions de son interlocuteur étaient « en opposition » avec celles du Front national devenu Rassemblement national.

Jean-Luc Schaffhauser avait en outre reconnu lors de son audition avoir rencontré le président russe, « mais dans un cadre professionnel, pas comme élu », en faisant par ailleurs valoir, au détour d’une autre réponse, qu' « il est évident que si le pouvoir en place [Vladimir Poutine] était contre, l’affaire [du prêt] ne se serait pas faite. »

Source: 20 Minutes