Tariq Ramadan a été acquitté dans une affaire de viols en Suisse, la partie plaignante fait appel

May 24, 2023
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« Le tribunal n’a pas été en mesure de se forger une intime conviction de culpabilité au-delà du doute raisonnable ». Jugé pour viol « à trois reprises » et « contrainte sexuelle » durant la nuit du 28 au 29 octobre 2008, dans un hôtel de Genève, l’islamologue suisse Tariq Ramadan a été acquitté par le le tribunal correctionnel de Genève. L’Etat de Genève a été condamné à lui verser 151 000 francs suisses (environ 154 400 euros) pour ses frais de défense.

La partie plaignante a immédiatement annoncé faire appel. Trois ans de prison dont la moitié ferme avaient été requis la semaine dernière par le procureur.

Le procès de Tariq Ramadan, très attendu, a mis au jour deux versions opposées des faits. M. Ramadan, figure charismatique et contestée de l’islam européen, nie tout acte sexuel et se dit victime d’un « piège ».

La plaignante, « Brigitte », qui a choisi ce pseudonyme pour se protéger des menaces, assure, en revanche, que l’islamologue l’a soumise à des actes sexuels brutaux accompagnés de coups et d’insultes dans la chambre de l’hôtel genevois où il séjournait, la nuit du 28 octobre 2008. « Brigitte », aujourd’hui âgée de 57 ans, a porté plainte dix ans après les faits, en 2018, encouragée, a-t-elle expliqué, par le fait que d’autres femmes avaient fait de même contre Tariq Ramadan en France.

Les deux s’accordent à dire qu’ils ont passé la nuit ensemble dans la chambre de l’hôtel, qu’elle a quitté tôt le matin pour rentrer à son domicile. Tariq Ramadan assure que c’est elle qui s’est invitée dans sa chambre. Il dit s’être laissé embrasser avant de mettre rapidement fin à l’échange. Une version que dément « Brigitte », qui a raconté pendant l’audience avoir eu « peur de mourir » sous les coups de l’islamologue.

Le procureur genevois a, lui, accusé Tariq Ramadan de s’être rendu coupable de « viol à trois reprises » dans la même nuit et de « contrainte sexuelle ». La plaignante a demandé le remboursement des frais d’avocats et une indemnisation à hauteur de 50 000 francs suisses (51 300 euros).

Soupçons de viols en France

Pendant l’audience, la défense a tenté de démontrer l’innocence de Tariq Ramadan, en assurant qu’il n’y avait pas de preuves scientifiques. Ses avocats ont également accusé « Brigitte » et les femmes ayant porté plainte en France d’avoir tissé des liens avec pour objectif de faire tomber l’islamologue.

Les avocats de la plaignante ont, eux, fait valoir qu’elle avait bien consulté dans les jours suivants la nuit du 28 octobre 2008 deux psychiatres pour leur relater les faits et leur parler de son état de stress. Elle a fait savoir durant l’enquête avoir fait la connaissance de l’islamologue lors d’une séance de dédicaces quelques mois avant les faits, avant de le revoir lors d’une conférence, puis de correspondre sur un ton de plus en plus intime sur des réseaux sociaux.

En France, Tariq Ramadan est soupçonné de viols commis entre 2009 et 2016 sur quatre femmes, une affaire qui a déclenché sa chute, en 2017. Le parquet de Paris a requis en juillet son renvoi devant une cour d’assises et il appartient aux juges d’instruction d’ordonner un procès ou non. Le dossier français lui a valu plus de neuf mois de détention provisoire en 2018. Il est depuis sous contrôle judiciaire en France, mais bénéficie d’autorisations exceptionnelles pour se rendre en Suisse.

Le Monde

Source: Le Monde