Avec la " décivilisation ", Macron accusé de reprendre un concept de l’extrême droite

May 24, 2023
240 views

CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

POLITIQUE - Le poids des mots. Emmanuel Macron a comparé, ce mercredi 24 mai en Conseil des ministres, les violences « quelle que soit la cause » à un « processus de décivilisation », selon les confidences à l’AFP d’un participant à la réunion, confirmant une information du Parisien. Des propos qui renvoient implicitement aux menaces et à l’incendie de la maison du maire de Saint-Brévin, à la mort de trois policiers du Nord dans un accident de la route ou encore à l’assassinat de l’infirmière du CHU de Reims.

« Il faut être intraitable sur le fond. Aucune violence n’est légitime, qu’elle soit verbale ou contre les personnes. Il faut travailler en profondeur pour contrer ce processus de décivilisation », a déclaré le président de la République, selon cette source. Cette expression se veut une « interpellation de la société » sur elle-même, parce que « le politique n’est pas le seul responsable », a expliqué en outre un proche du chef de l’État cité par Le Parisien.

Problème : pour la gauche, il s’agit surtout d’un concept utilisé par la droite et l’extrême droite. Renaud Camus, le théoricien identitaire, chantre de la théorie xénophobe du « grand remplacement », a notamment publié un livre intitulé « Décivilisation » en 2011. Ce que ne manquent pas de rappeler plusieurs élus écolos ou de la France insoumise sur les réseaux sociaux.

« Considérer que ce serait pure coïncidence est soit une farce, soit affligeant »

« Soit le président de la République est en réalité dépourvu d’intelligence du verbe, d’inhibition républicaine et de réflexion sur les mots qu’il emploie. Soit le président de la République sait ce qu’il fait en reprenant les thèmes et les termes de l’extrême droite », s’interroge par exemple le député Génération⋅s Benjamin Lucas sur Twitter, quand son collègue (LFI) Alexis Corbière ajoute : « Considérer que ce serait pure coïncidence est soit une farce, soit affligeant. » Renaud Camus a d’ailleurs lui même réagi sur les réseaux sociaux.

Vous avez refusé les cookies associés aux contenus issus de tiers en vous abonnant. Vous ne pourrez donc pas lire nos vidéos qui ont besoin de cookies tiers pour fonctionner.

Vous utilisez un bloqueur de publicité. Nous vous conseillons de le désactiver afin d’accéder à nos vidéos. Si vous n'êtes dans aucun de ces deux cas, contactez-nous à aide@huffingtonpost.fr Vous ne pouvez pas visionner ce contenu car :

En réalité, le concept de « décivilisation » renvoie d’abord au sociologue Norbert Elias qui l’a développé avant la Seconde Guerre mondiale. Dans un ouvrage publié en deux parties en français (La Civilisation des mœurs et La Dynamique de l’Occident), l’auteur britannico-allemand analyse les évolutions des mœurs et les ressorts culturels et sociaux de l’apparition et de la montée du national-socialisme en Allemagne.

Mais depuis plusieurs années, c’est bien la droite et son extrême qui reprennent le terme en chœur. Outre Renaud Camus, David Lisnard (le maire LR de Cannes) et Bruno Retailleau, le président des sénateurs LR, ont dernièrement dénoncé un processus de « décivilisation » en France.

Ce dernier a effectivement estimé, mercredi 17 mai, que les maires « sont confrontés à une forme de décivilisation de notre société, un ensauvagement », devant les journalistes de l’Association de la presse parlementaire. Le même jour, son collègue David Lisnard expliquait que l’agression dont Yannick Morez, le maire de Saint-Brévin, a été victime, « est un révélateur de l’impuissance publique croissante de l’État et de l’ensauvagement de notre société, reflet d’une décivilisation caractérisée par une perte de repères et de sens. »

Du côté du gouvernement, rares sont ceux à reprendre le terme, pour l’instant. Le porte-parole Olivier Véran s’est pour sa part inquiété de l’absence de « restriction » ou de « capacité à respecter celui ou celle qui sauve la vie des gens et de soi » au sortir du Conseil des ministres, après la mort d’une infirmière au CHU de Reims.

Une minute de silence, en présence à Paris de la Première ministre Élisabeth Borne, a été observée dans tous les hôpitaux de France en mémoire de cette infirmière, Carène Mezino, tuée par un homme souffrant de troubles psychiatriques. Emmanuel Macron doit pour sa part se rendre jeudi à Roubaix (Nord) pour rendre hommage à trois jeunes policiers tués dans une collision dimanche avec un véhicule dont le conducteur était fortement alcoolisé et drogué.

À voir également sur Le HuffPost :

Source: Le HuffPost