La mort brutale de Jean-Louis Murat, paysan de la chanson

May 26, 2023
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Jean-Louis Murat, en 2011. FRANK LORIOU / AGENCE VU

Auteur, comme son héros canadien Neil Young, d’une œuvre prolifique avec une vingtaine d’albums studio, également sensible au paysage, aux bêtes et aux éléments naturels jusqu’à offrir une déclinaison à la française − ou à l’auvergnate – du country-rock, Jean-Louis Murat est brutalement mort, jeudi 25 mai, à son domicile de Douharesse, sur la commune d’Orcival (Puy-de-Dôme), dans le Parc naturel des volcans d’Auvergne. Agé de 71 ans, le chanteur et musicien a été victime d’un arrêt cardiaque, après avoir été réveillé par une vive douleur à la jambe. L’intervention du SAMU n’a pas pu le sauver. De nature complexe, à la fois taciturne et blagueur, Murat avait été récemment éprouvé par la perte de sa mère et le divorce d’avec sa femme.

Avec lui disparaît une des plus fortes et controversées personnalités de la scène hexagonale, qui avait usé de la provocation dès son premier 45-tours, Suicidez-vous le peuple est mort (1981), héritier de la noirceur et de la misanthropie d’un Gérard Manset. Firent les frais de son fiel guère confraternel Les Enfoirés, Renaud et Michel Polnareff (qualifiés diplomatiquement de « gros cons »), les icônes Johnny Hallyday et Jean-Jacques Goldman, ou d’aussi innocentes victimes qu’Alain Souchon et Laurent Voulzy. Cash à l’excès, Murat avait rapidement compris que sa voix ne porterait dans le système médiatique qu’avec le clash. Au risque qu’on ne parle pas de sa musique.

Sa langue de vipère en fit un client recherché des plateaux de télévision. Il n’avait aucun désir de plaire et réussit à se faire autant d’ennemis que d’admirateurs, charmés, eux, par sa veine poétique et son refus de respecter les règles du show-business. « On a vécu avec lui. On s’est souvent engueulés, mais qu’est-ce qu’on a pu se marrer », se souvient Didier Veillaud, directeur de La Coopérative de mai, la salle de musiques actuelles de Clermont-Ferrand. D’autres exercent ce métier comme des employés de bureau, Murat écrivait, chantait, jouait et enregistrait comme on respire.

Un goût pour la poésie et l’écriture

Jean-Louis Bergheaud est né le 28 janvier 1952 à Chamalières (Puy-de-Dôme), une commune qui allait acquérir une notoriété nationale, vingt-deux ans plus tard, lorsque son maire, Valéry Giscard d’Estaing, se déclarera candidat à la présidence de la République. Ses origines nouent d’emblée un double attachement, à l’artisanat par son père menuisier et sa mère couturière, à ce terroir auvergnat dont il n’aura cessé de chanter la rudesse et la beauté. Son nom d’artiste provient du village de Murat-le-Quaire, où ses grands-parents possèdent une ferme. Plus tard, il écrira Le Berger de Chamablanc et Au mont Sans-Souci, un centre de colonie de vacances à la Bourboule.

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Source: Le Monde