Pèlerinage de Chartres : affluence record avec 16 000 fidèles réunis autour du rite tridentin

May 29, 2023
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« Pas de Covid, mais un beau soleil et pas de nouveau motu proprio ! » En préambule de la procession et de la messe célébrée en plein champ, ces paroles ont été fortement applaudies, dimanche 28 mai. Elles résument l’état d’esprit des 16 000 hommes, femmes et enfants qui ont relié Paris à Chartres (Eure-et-Loir) durant le week-end de Pentecôte, et en bivouac à Sonchamp (Yvelines).

Ils sont venus pour l’eucharistie et pour être portés par « le maintien de la liturgie traditionnelle dans l’Église ». Ce 41e pèlerinage itinérant de l’association Notre-Dame de Chrétienté n’aura pas été, cette fois, bridé par la crise sanitaire de 2020 et 2021, ni soumis aux bourrasques diluviennes de 2022. Jamais l’événement n’avait enregistré autant de participants de France ou de l’étranger. Les inscriptions ont dû être clôturées dix jours avant.

Les organisateurs entendaient en faire une démonstration de force de l’attachement à la forme préconciliaire de la liturgie, dans le contexte du motu proprio Traditionis custodesdu pape François. Publié le 16 juillet 2021, celui-ci limite strictement les possibilités de célébrer la messe selon l’ancienne forme du rite.

« Même les non-croyants se posent des questions »

Certains marcheurs viennent depuis si longtemps qu’ils ont oublié de compter. « J’ai dû faire une dizaine d’éditions, au début avec les enfants, maintenant avec les amis disponibles », explique Jean-Michel, 66 ans, de Louveciennes (Yvelines).

Manuel, lui, se souvient de son premier pèlerinage, « il y a vingt ans ». Cette année, il mène un chapitre – un groupe – de 25 personnes âgées de 35 à 70 ans, non-croyantes ou recommençantes. « Même les non-croyants se posent des questions et tous veulent s’enrichir spirituellement », raconte-t-il.

Venu de Bordeaux, Éloi, 21 ans, s’est vu confier un chapitre avec « beaucoup de catéchumènes et de personnes qui veulent découvrir la messe traditionnelle. C’est magique, ce pèlerinage ne laisse personne indifférent », assure-t-il.

Pour sa part, Ghislain, 21 ans, étudiant en histoire, est venu de La Roche-sur-Yon (Vendée). « J’en avais entendu parler, et je me suis dit “Pourquoi pas moi ?” » Mais il n’a pas informé les amis qui lui avaient suggéré de s’inscrire car « c’est une démarche personnelle, un moment privilégié que je ne prends pas le temps de vivre dans l’année ».

À ses yeux, l’effort physique lui garantit « ce temps avec Dieu que je ne parvenais pas à trouver seul ». Reviendra-t-il les prochaines années ? « Pas forcément, car c’est fatigant de marcher, répond-il. Prier tout le temps, ça m’épuise, même si c’est normal, c’est intense. » S’il estime « la messe en latin menacée de fait par le Motu proprio », il considère aussi qu’« il y a un devoir de suivre l’Église plus que de suivre tel ou tel rite. Ce n’était donc pas ma motivation de venir. »

Ce n’est pas non plus ce qui a guidé Céline, 34 ans, originaire des Hauts-de-Seine, qui depuis la crise sanitaire éprouve le besoin de marcher, et renoue avec la pratique religieuse. « Je ne connaissais pas ce pèlerinage, mais comme je veux aller à Saint-Jacques-de-Compostelle seule, un ami m’a dit qu’avant de marcher deux ou trois mois, je devrais commencer par deux ou trois jours, explique-t-elle. Je suis venue tester mes capacités physiques, mais j’allégerai mon sac ! »

Pourtant, les pèlerins ne cheminent qu’avec pique-nique, casquette et eau, tandis que 43 000 sacs, tentes, duvets, sont transportés par camion jusqu’aux lieux de bivouac.

« Nous constatons une grande soif de spiritualité »

Annonciade, 16 ans, n’est pas novice ici, « mais c’est la première fois que je fais le pèlerinage en entier », confie la jeune Versaillaise, émerveillée par « la beauté de pèleriner entre jeunes avec la même foi et la même espérance ». Elle trouve que le latin offre « une belle messe, très priante. C’est un rite à faire perdurer ».

Comme elle, Madeleine, 12 ans, de Sées (Orne) apprécie « l’ambiance » de ce pèlerinage auquel elle participe pour la première fois. « Parfois ça fait mal de marcher, mais ça nous nourrit », explique l’adolescente.

À 36 et 38 ans, ce ne sont pas Maÿlis et Stanislas, de Montigny-le-Bretonneux (Yvelines), qui la contrediront. La première marche sur la route de Chartres pour la quatrième fois. Son époux, lui, prend part au pèlerinage « depuis l’âge de 7 ans ».

À la tête du chapitre pèlerins d’Emmaüs, qui a pour mission d’expliquer aux passants la démarche du pèlerinage, ils y voient une démarche d’évangélisation, « une occasion de parler de Jésus. Sur notre route, on nous interroge, nous expliquons la démarche. Nous constatons une grande soif de spiritualité », confie Stanislas. « Le pèlerinage, c’est une bouffée d’oxygène et la grande qualité du silence nous permet de nous retrouver. »

Maÿlis apprécie « la messe fervente, avec de beaux chants », mais « ce n’est pas une question de latin », explique-t-elle. Stanislas, qui a grandi avec la messe traditionnelle, y trouve une meilleure réponse à son besoin de silence, surtout quand les messes sont « bien préparées et bien soignées ». Mais il n’aime pas opposer les deux rites : « Cette comparaison n’est pas mon combat. »

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Source: La Croix