Au Kosovo, des heurts opposent des manifestants serbes à la police et à des soldats de la force de l’OTAN déployée dans le pays

May 29, 2023
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Des soldats de la KFOR montent la garde lundi 29 mai 2023 devant un bâtiment municipal à la suite de heurts avec des Serbes, dans le nord du Kosovo. BOJAN SLAVKOVIC / AP

La police kosovare a dispersé lundi 29 mai à l’aide de gaz lacrymogène des manifestants serbes réclamant le retrait du nord du Kosovo, où ils sont majoritaires, des maires albanais qui viennent d’y prendre leurs fonctions. Des soldats de la force de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) déployée au Kosovo (KFOR) se sont interposés, avant d’essuyer à leur tour des jets de pierre et d’engins incendiaires.

Dans la matinée, des contestataires Serbes, qui exigent aussi le départ des forces de l’ordre spécialement déployées dans la région depuis plusieurs jours, se sont rassemblés devant l’une des mairies concernées, celle de Zvecan, et ont essayé d’y entrer. Les policiers les ont immédiatement repoussés en faisant usage de gaz lacrymogène, comme l’a constaté une journaliste de l’Agence France-Presse (AFP).

A Zvecan, « les manifestants, recourant à la violence et utilisant du gaz lacrymogène, ont tenté de franchir les cordons de sécurité et de pénétrer par effraction dans les locaux de la municipalité », a rapporté la police dans un communiqué. Elle a déclaré que, au total, des manifestations s’étaient déroulées devant trois mairies du nord du territoire kosovar où vivent de nombreux Serbes de souche qui sont restés fidèles à Belgrade et ont rejeté l’indépendance proclamée, en 2008, du Kosovo, une ancienne province de Serbie.

Pierres et « engins incendiaires » contre la KFOR

La KFOR, qui exhorte Belgrade et Pristina à reprendre le dialogue qui avait commencé sous les auspices de l’Union européenne, avait positionné une cinquantaine de soldats polonais et hongrois autour de la mairie de Zvecan, selon la journaliste de l’AFP. Ces derniers ont, dans un premier temps, tenté de séparer les manifestants des policiers, mais ont ensuite commencé à disperser la foule à l’aide de gaz lacrymogène et de grenades éblouissantes. Les protestataires ont riposté en jetant des pierres sur les soldats, mais ont été rapidement repoussés à quelques centaines de mètres du bâtiment.

« L’OTAN condamne fermement les attaques non provoquées contre les troupes de la KFOR dans le nord du Kosovo, qui ont fait un certain nombre de blessés. Ces attaques sont totalement inacceptables. La violence doit cesser immédiatement », a déclaré un porte-parole de l’Alliance. Les heurts ont fait près de vingt-cinq blessés parmi les troupes de la KFOR.

Plusieurs soldats des contingents italien et hongrois de la KFOR « ont été la cible d’attaques non provoquées et ont subi des blessures traumatiques avec des fractures et des brûlures dues à l’explosion d’engins incendiaires » en « contenant les franges les plus actives de la foule », a dit la force multinationale dans un communiqué.

Deux équipes de médias de Pristina ont, par ailleurs, affirmé que des protestataires avaient crevé les pneus de leurs véhicules et les avaient aspergés de peinture.

La première ministre italienne, Giorgia Meloni, a fait part de sa « condamnation la plus ferme » après « l’attaque survenue contre la mission de la KFOR ». « Il est fondamental d’éviter de nouvelles actions unilatérales de la part des autorités kosovares et que toutes les parties fassent immédiatement un pas en arrière pour faire baisser les tensions », a-t-elle dit dans un communiqué. Onze soldats italiens ont été blessés, dont « trois sont dans un état grave », a précisé le ministre des affaires étrangères italien, Antonio Tajani, dans un tweet.

L’armée serbe en état d’alerte maximale

Les Serbes, dont les représentants politiques ont quitté en novembre les institutions locales dans le nord du Kosovo, ont boycotté en avril les élections municipales organisées par le gouvernement kosovar pour mettre fin à ce vide institutionnel.

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Les édiles élus à cette occasion, que les protestataires ne considèrent pas comme leurs représentants légitimes, l’ont été avec une très faible participation : seuls quelque 1 500 électeurs, sur environ 45 000 inscrits, y ont pris part.

Des incidents s’étaient déjà produits vendredi dans cette région lorsque ces maires albanais de souche étaient allés prendre leurs fonctions accompagnés par la police. Le président serbe, Aleksandar Vucic, avait donné vendredi l’ordre à l’armée de se placer en état d’alerte maximale et de « se mettre en mouvement » en direction de la frontière avec le Kosovo, comme cela a été régulièrement le cas ces dernières années.

Les poussées de fièvre sont fréquentes dans le nord du Kosovo. Quelque 120 000 Serbes vivent dans ce pays de 1,8 million d’habitants très majoritairement albanais.

Les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni, l’Italie et l’Allemagne avaient exhorté dès vendredi les autorités du Kosovo « à immédiatement revenir sur leur décision » de déployer leurs forces spéciales, affirmant également être « préoccupés par la décision de la Serbie de relever le niveau de préparation » de son armée.

Le Monde avec AFP

Source: Le Monde