Assassinat d’Yvan Colonna : la commission d’enquête parlementaire pointe les " graves défaillances " de la prison d’Arles

May 30, 2023
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Deux prisonniers soumis au statut de détenus particulièrement signalés à la maison centrale d’Arles (Bouches-du-Rhône) : le premier avait été à l’origine de treize incidents mineurs en dix-huit années de détention, le second les multipliait au rythme de six par mois en moyenne. C’est le second, Franck Elong Abé, qui a été mis en examen pour l’assassinat du premier, Yvan Colonna, au cours d’une agression perpétrée le 2 mars 2022. Le prisonnier corse, condamné à une peine de réclusion à perpétuité pour l’assassinat du préfet Claude Erignac, à Ajaccio, le 6 février 1998, en est mort après vingt jours de coma.

Le rapport de la commission d’enquête parlementaire « chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements au sein de l’administration pénitentiaire et de l’appareil judiciaire ayant conduit à l’assassinat d’un détenu le 2 mars 2022 à la maison centrale d’Arles », auquel Le Monde a eu accès, raconte en détail les tenants et les aboutissants de ce drame, qui a soulevé une vague d’émotion et de colère sans précédent en Corse, marquée par plusieurs semaines de manifestations et d’affrontements violents avec les forces de l’ordre.

Présidée par Jean-Félix Acquaviva (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, autonomiste) et rapportée par Laurent Marcangeli (Horizons), deux députés corses, la commission, à l’issue de dizaines d’auditions, met en cause la maison centrale d’Arles, l’administration pénitentiaire et le parquet national antiterroriste (PNAT) dans leur gestion du cas Franck Elong Abé. Tout au long du rapport, les réponses des représentants de ces institutions apparaissent souvent parcellaires et confuses, voire contradictoires.

Attitude « dissimulatrice »

Le contraste apparaît effectivement saisissant entre Yvan Colonna, détenu exemplaire et apprécié bien que « marqué au fer rouge » d’un statut d’exception, et Franck Elong Abé, détenu pour terrorisme islamiste, à la santé mentale vacillante et au comportement explosif. Pourtant, les deux hommes entretenaient de bonnes relations, semble-t-il. Le rapport parlementaire écarte la thèse du blasphème de Colonna – qui aurait dit qu’il « crachait sur Dieu » – invoqué par Franck Elong Abé pour justifier son agression : elle est « considérée comme peu probable ».

Le rapport souligne que « le parcours [carcéral] de Franck Elong Abé contraste de manière flagrante avec celui d’Yvan Colonna ». « Alors que la dangerosité et l’instabilité de l’individu sont manifestes, l’administration pénitentiaire va (…) faire preuve (…) d’une attitude diamétralement opposée à celle dont elle a fait montre à l’endroit d’Yvan Colonna. » Il ajoute : « Des manquements ont bien été constatés », avant de les lister longuement.

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Source: Le Monde