Pologne : une commission d’enquête sur " l’influence russe " suscite l’indignation

May 31, 2023
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Le chef de l’opposition polonaise et ancien premier ministre Donald Tusk, au Parlement de Varsovie, le 26 mai 2023. CZAREK SOKOLOWSKI / AP

La loi instaurant une commission d’enquête sur l’influence russe entre 2007 et 2022 est entrée en vigueur, mercredi 31 mai, en Pologne. Baptisée « Lex Tusk », elle semble avoir été taillée pour viser Donald Tusk, le leader du parti d’opposition Plate-forme civique (PO). Premier ministre de 2007 à 2014, avant de devenir président du Conseil européen, ce dernier est accusé par les ultraconservateurs de Droit et justice (PiS), au pouvoir depuis 2015 en Pologne, d’avoir entretenu une proximité avec le président russe, Vladimir Poutine, lors de son mandat.

Composée de neuf membres choisis par la Diète, cette commission pourra bannir pendant dix ans de tout poste public impliquant un accès aux « finances publiques », ou aux informations classifiées, toute personne ayant agi « au détriment des intérêts de la République de Pologne », en faveur du régime russe. Le champ d’activités susceptibles de tomber sous le coup de la loi est large et inclut notamment les cadres haut placés ou les fonctionnaires ayant « participé à la négociation d’un accord international » ou aidé à élaborer « la position de la République de Pologne dans des forums internationaux ».

Rejetée par le Sénat, la commission a été jugée anticonstitutionnelle par de nombreux juristes ainsi que par le bureau législatif de la Diète, et a provoqué la consternation au sein de l’opposition. Elle a également suscité l’inquiétude de Washington et de Bruxelles. Les Etats-Unis ont dit craindre une loi « qui pourrait être utilisée de manière abusive pour interférer avec les élections libres et équitables en Pologne ». Vera Jourova, vice-présidente de la Commission européenne, s’est pour sa part déclarée « très préoccupée » face à une loi qui pourrait « affecter les possibilités des personnes à remplir des fonctions publiques sans procès équitable ».

« Commission politisée »

Le médiateur polonais, Marcin Wiacek, reçu sur le plateau de la chaîne de télévision privée TVN 24, le 29 mai, avait relevé « des désaccords sur plusieurs principes constitutionnels ». Il a souligné que, « dans un pays régi par la primauté du droit, des sanctions sont imposées par un tribunal pour des actes interdits par la loi au moment où ils ont été commis. Cette loi viole ces deux principes ».

Le même jour, le président de la République, Andrzej Duda, s’était empressé de signer le texte. « La transparence dans l’explication des questions publiques et politiques d’importance est absolument cruciale pour moi », s’est-il justifié, assurant que « ces discussions sur l’influence russe ont également lieu aux Etats-Unis, en France, comme en Allemagne ». Le président a tout de même renvoyé la loi au Tribunal constitutionnel pour un contrôle post factum.

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Source: Le Monde