Fonds Marianne : face aux sénateurs, les principaux bénéficiaires peinent à se justifier
Après le commanditaire – le préfet Christian Gravel, secrétaire général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) –, c’était mardi 30 et mercredi 31 mai au tour des bénéficiaires du fonds Marianne, mis en place à la suite de l’assassinat terroriste de Samuel Paty en 2020, de s’expliquer devant la commission d’enquête sénatoriale autour de l’emploi de cette manne de 2,5 millions d’euros.
Plusieurs enquêtes journalistiques ont révélé que l’attribution comme l’usage de cet argent par quelques associations bénéficiaires présentaient de graves irrégularités. Une enquête administrative, de même qu’une information judiciaire pour « détournement de fonds publics », « abus de confiance » et « prise illégale d’intérêt » ont été lancées à la suite de ces révélations.
Les premières associations entendues mardi, Civic Fab, Fraternité générale ou l’Observatoire du conspirationnisme, dont le travail est reconnu depuis des années, avaient pu sans difficulté détailler l’usage qu’elles avaient fait du fonds. Pour les deux structures auditionnées mercredi par les sénateurs, l’exercice s’est révélé plus ardu. L’Union des sociétés d’éducation physique et de préparation militaire (USEPPM) et Reconstruire le commun sont pourtant, avec respectivement 355 000 et 330 000 euros, les deux plus importants bénéficiaires du fonds.
« Ma première demande de subvention »
Le principal responsable de la première, Mohamed Sifaoui, n’était pas présent devant les sénateurs « pour raisons de santé ». C’est donc le président de l’USEPPM, Cyril Karunagaran, qui a défendu la soudaine motivation de cette structure, née en 1885, à se lancer dans le « contre-discours républicain », à la suite d’une proposition du « cabinet de Marlène Schiappa », à l’époque ministre déléguée à la citoyenneté, qui a demandé à M. Sifaoui de lancer une initiative de riposte sur les réseaux sociaux. « Un projet ambitieux qui demandait des moyens considérables », explique M. Karunagaran.
Le dossier est ficelé en quelques jours, ce qui conduit à « des erreurs », reconnaît-il. A commencer par un budget trop ambitieux – l’association, qui avait jusqu’ici un budget annuel d’environ 50 000 euros, demande au CIPDR 1,5 million d’euros sur trois ans – qu’il faut réajuster après un premier refus. « C’est ma première demande de subvention », justifie M. Karunagaran, qui vient du monde de l’entreprise. En outre, l’association devait, pour toucher les fonds, trouver d’autres partenaires financiers. « On a eu des discussions », assure son président, mais aucune n’a débouché. « Comment peut-on démarrer un projet sans être certain d’avoir les sommes prévues ? », s’interroge le président de la commission des finances, Claude Raynal (Parti socialiste).
Il vous reste 44.21% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
Source: Le Monde