Pour Fabio Panetta, de la BCE, " il ne faut pas aller trop vite dans la hausse des taux d’intérêt "
La Banque centrale européenne (BCE) serait-elle à un virage ? Jeudi 1er juin, Christine Lagarde, sa présidente, a pour la première fois laissé entendre que la forte montée des taux d’intérêt pourrait bientôt s’arrêter : « Nous nous approchons de notre altitude de croisière et nous devons monter plus graduellement. »
Dans un entretien au Monde, Fabio Panetta, l’un des six membres du directoire de la BCE – considéré comme le plus « colombe » (favorable à un assouplissement de la politique monétaire) de tous – va dans le même sens, estimant que l’institution « n’est pas loin » du terme dans la hausse des taux. Il craint aussi une « récession technique » pour la zone euro courant 2023.
L’objectif de la BCE est de maintenir l’inflation à 2 %. Celle-ci est actuellement de 6,1 %. Faut-il s’en inquiéter ?
L’inflation est trop élevée, mais il n’y a pas de raisons de s’inquiéter. Nous mettons tout en œuvre pour ramener l’inflation à 2 %. En moins d’une année, nous avons fortement relevé nos taux d’intérêt, les faisant passer de – 0,5 % à 3,25 %, et l’inflation ralentit, comme les données publiées jeudi 1er juin [l’inflation en zone euro est passée de 7 % en avril à 6,1 % en mai] le confirment.
Nos hausses de taux renchérissent le crédit bancaire et cela affecte l’investissement des entreprises et des ménages. Mais la politique monétaire a un délai d’action assez long et il faut généralement plusieurs trimestres pour que ses effets réels se fassent pleinement sentir sur l’économie réelle et soient transmis à l’inflation.
Mais combien de temps faudra-t-il avant que l’inflation ne revienne à un niveau raisonnable ? Disons 3 %.
Nos dernières projections macroéconomiques suggèrent une inflation d’environ 3 % début 2024 et proche de 2 % en 2025, sans tenir compte bien sûr d’éventuels nouveaux chocs.
La BCE affirme depuis l’automne 2021 que l’inflation reviendra bientôt à 2 %. Pourquoi les Européens vous croiraient-ils maintenant ?
Les investisseurs comprennent que la hausse de l’inflation est due à une série de chocs mondiaux ne relevant pas de la politique monétaire. Ils savent que nous continuerons à agir tant que nous n’observerons pas une évolution convaincante de l’inflation vers notre objectif de 2 %, et s’attendent à ce qu’elle revienne à ce niveau. Si nous n’avons pas réussi jusqu’à présent, ce n’est pas pour les raisons avancées par les commentateurs, qui annonçaient une forte hausse de l’inflation en 2021.
Personne n’avait prévu le grave engorgement des chaînes logistiques, la guerre en Ukraine ou la manipulation par la Russie des approvisionnements d’énergie. Sans ces événements imprévisibles, nous serions dans un monde totalement différent et l’inflation serait beaucoup plus faible.
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Source: Le Monde