A l’approche de l’été, " la pénurie grave de maîtres-nageurs " inquiète les professionnels

June 03, 2023
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« Il y a une pénurie grave, on essaie de prévenir depuis le siècle dernier. » Le ton grave, Axel Lamotte, membre du Syndicat national professionnel des maîtres nageurs sauveteurs (SNPMNS), s’alarme en faisant l’état des lieux de la profession alors que les beaux jours ont d’ores et déjà pointé le bout de leur nez. Selon lui, il manquerait « 5.000 postes, tout au long de l’année » pour assurer la sécurité des baigneurs alors qu’en France on a déploré 1.480 noyades en 2021, dont 27 % ont entraîné un décès selon Santé publique France.

Comme beaucoup d’autres, Mathieu D. a délaissé ses palmes et son sifflet pour donner des cours de surf sur la côte landaise : « Je m’y retrouve beaucoup plus financièrement, si j’avais pu, j’aurais peut-être continué, mais le métier n’est pas assez valorisé. »

Même son de cloche chez Axel Lamotte, qui tente d’expliquer les difficultés que rencontre son secteur : « D’abord il y a le facteur financier, avec un métier qui n’est pas assez reconnu. Aujourd’hui, on est même en dessous du SMIC car on ne prend pas en compte le temps que l’on perd à se mettre en tenue de travail, parfois jusqu’à plusieurs fois par jour, ou que l’on prend pour préparer nos séances par exemple. On peut aussi parler des contraintes de travailler en soirée ou les week-ends qui ne sont pas souvent prises en compte. »

Des conditions de travail qui ne sont pas « en adéquation avec les responsabilités qu’endossent les maîtres nageurs » selon le responsable du syndicat. « C’est à la fois civil et pénal, explique-t-il. Un maître nageur risque jusqu’à cinq ans de prison et 75.000 € d’amende. »

Des surveillants pas assez qualifiés ?

Alors, pour faire face à ce manque de bras, les collectivités et les entreprises en charge du recrutement doivent s’adapter et faire appel à de nouveau profils. « Aujourd’hui, je dirais que c’est près de 90 % des surveillants de plages qui sont titulaires du BNSSA, estime Axel Lamotte. Au départ, le Brevet national de sécurité et de sauvetage aquatique n’était censé former que des assistants aux maîtres-nageurs, aujourd’hui ils sont devenus la norme. La plupart du temps ce sont de jeunes étudiants qui cherchent à se faire un peu d’argent durant l’été et qu’on laisse en autonomie ». Une formation express qui ne permet pas, selon lui, de « surveiller convenablement » des baignades.

En plus du manque de personnel, le maître-nageur s’indigne particulièrement aussi du niveau global de la nage en France. « Pour former quelqu’un à devenir nageur, je dirais qu’il faut cinq ans, martèle-t-il. Et déjà, pour sauver quelqu’un, même un enfant, c’est mission impossible pour quelqu’un qu’on considère comme un bon nageur. On a des tas d’exemple de très bons nageurs qui y ont laissé la vie en tentant de venir en aide à quelqu’un. Et même à ce moment-là, faudrait six mois de formations supplémentaires pour lui apprendre à devenir un sauveteur. »

« Il faut un plan d’urgence d’apprentissage de la nage »

Alors, quelles sont les solutions ? Axel Lamotte a bien un plan en tête : « Ce qu’il faut, c’est un plan d’urgence d’apprentissage de la nage, et ça passe par la formation d’urgence de maîtres nageurs sauveteurs. » D’autant plus que, selon lui, un autre phénomène devrait fortement accélérer l’évolution du nombre d’accident : « le réchauffement climatique ». « Quoi que l’on fasse, il y aura certainement une augmentation du nombre de noyades à cause de l’augmentation globale des températures. Alors, il faut endiguer le phénomène au maximum. »

Source: 20 Minutes