Coup d'éclat ou coup monté aux Molières ? La ministre de la Culture assume
Accusée d'avoir prémédité sa réponse à des syndicalistes, Rima Abdul Malak se défend de toute mise en scène sur fond de guéguerre avec Cyril Hanouna et de perspectives de remaniement.
La ministre de la Culture avait-elle prémédité son intervention lors de la cérémonie des Molières lundi soir ? La majorité et plusieurs de ses collègues du gouvernement ont salué la «justesse» de son propos et son «courage politique» à la suite de son intervention. Elle aurait même marqué des points auprès de l'Élysée et Matignon alors que les rumeurs de remaniements se multiplient. Après avoir été interpellée par deux militantes de la CGT-Spectacle, Rima Abul Malak avait riposté du tac au tac suscitant les applaudissements d'une partie de la salle.
Mais la séquence a tout aussi rapidement suscité l'ironie de ses adversaires. «Que de hasards : un micro-main qui tombe dans les mains de la ministre quelques secondes après avoir été interpellée», a fait mine de s'interroger le député LFI parisien Aymeric Caron sur Twitter. Mercredi, Cyril Hanouna a délaissé l'ironie pour lui préférer la charge en bonne et due forme, affirmant que ce coup d'éclat était en fait un coup monté. L'animateur de C8 est depuis plusieurs semaines en conflit ouvert avec Rima Abdul Malak qui a vertement critiqué le contenu de son émission TPMP. Le présentateur estime troublant qu'un micro ait été apporté à la ministre qui était assise dans la salle. Il s'étonne aussi qu'elle connaisse la date exacte de la citation de Gérard Philipe déclamée par les militantes sur scène - «les acteurs ne sont pas des chiens».
L'animateur star du groupe Bolloré se dit surtout persuadé que la ministre aurait eu accès au texte des deux militantes de la CGT, Toufan Manoutcheri et Lucie Astiert. Selon lui, le texte des syndicalistes, diffusé sur le prompteur donc fourni à l'équipe technique à l'avance, aurait été communiqué à Rima Abdul Malak. Pour appuyer ses spéculations, il convoque Jean-François Arnaud, du magazine Challenges. Le journaliste explique que le petit tapotement de Rima Abdul Malak est une «preuve» supplémentaire. «On voit qu'elle fait le geste comme si elle s'étonnait que le micro fonctionne, mais ça fonctionne très très bien. Elle le sait parfaitement puisqu'elle parle depuis plusieurs secondes dans le micro. C'est le petit coup pour faire croire aux téléspectateurs que c'est improvisé alors que ce n'est pas improvisé», a-t-il estimé.
Geste spontané ou préparé ? Avec la complicité des organisateurs - le président des Molières, Jean-Marc Dumontet, est un fervent soutien d'Emmanuel Macron - ou sans ? Le ministère de la Culture a démenti formellement auprès de TF1 Info que Rima Abdul Malak a eu accès d'une manière ou d'une autre au texte des deux comédiennes. La rue de Valois assume en revanche avoir «anticipé plusieurs scénarios pour la soirée des Molières». «La ministre envisageait de s'exprimer d'une manière ou d'une autre, explique le ministère à TF1 Info. À l'entrée du théâtre si elle était bloquée, aux journalistes présents (il est d'usage de donner des interviews sur place), ou directement dans la salle pendant la cérémonie.» Son entourage explique encore que la ministre «voulait se tenir prête et un micro avait été demandé au cas où elle souhaitait intervenir.»
Micro qui était disponible dans la salle pour des aspects techniques selon la productrice de l'événement Alexandra Clément. «Il y a toujours des micros en salle en cas d'incident, a-t-elle témoigné auprès de TF1. C'est une question de sécurité», en cas de problème technique. «Notre car régie est très loin : entre lui et le théâtre, notez qu'il y avait les manifestants de la CGT, donc il nous était impossible de traverser. Les conditions n'étaient pas super fluides lundi soir», ajoute Alexandra Clément.
Si le choix de Rima Abdul Malak de répondre a pu surprendre, l'intervention des syndicalistes, elle, ne faisait de toute façon pas de doute. Ce type de soirées télévisées est maintenant abonné à la parenthèse de revendications. Autrefois improvisées, les irruptions sont maintenant la plupart du temps négociées entre organisateurs des cérémonies et représentants syndicaux. La soirée des Molières ne pouvait faire exception, surtout dans le contexte tendu de la réforme des retraites. En amont de la soirée, la CGT-Spectacle avait d'ailleurs annoncé qu'elle envisageait une action pendant les Molières. De son côté la CGT Énergies menaçait de couper le courant à des événements culturels. «En mai, fais ce qu'il te plaît ! Le festival du film de Cannes, le Grand Prix de Monaco, le tournoi de Roland-Garros, le festival d'Avignon pourraient se retrouver dans le noir ! On ne lâchera rien !», annonçaient les syndicats de la Fédération nationale Mines Énergie (FNME) CGT.
Source: Le Figaro