À Nîmes, une médiathèque fermée et un journaliste agressé près d'un point de deal

June 06, 2023
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Un reporter de M6 a été agressé dans le quartier de Pissevin par deux hommes. Il souffre actuellement «de nombreux coups et de multiples ecchymoses», selon le Club de la presse Occitanie.

Un journaliste de M6 a été frappé «debout et au sol» mardi à Nîmes, dans un quartier paupérisé où la mairie a décidé de fermer jusqu'à nouvel ordre une médiathèque municipale en raison de l'aggravation des violences liées aux trafics de drogue.

Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a condamné «fermement l'agression» du journaliste et lui a apporté son soutien. «Une compagnie de CRS sera envoyée en renfort dans les prochaines heures afin de garantir la paix publique», a-t-il ajouté. De son côté le groupe M6 «condamne fermement son agression, apporte tout son soutien à Jérôme Régali et renouvelle son attachement à la liberté d'informer», a aussi réagi la chaîne de télévision dans un communiqué.

Une «scandaleuse atteinte à la liberté d'informer»

À peine arrivé à Pissevin, quartier dit de «reconquête républicaine» aux nombreuses tours et barres d'immeubles, le journaliste reporter d'image (JRI) basé à Montpellier a été agressé par deux hommes, qui ont pris la fuite, selon une source policière. Emmené à l'hôpital pour des examens, «il souffre de nombreux coups et de multiples ecchymoses», a indiqué le Club de la presse Occitanie, en dénonçant une «scandaleuse atteinte à la liberté d'informer».

Le maire de Nîmes, Jean-Paul Fournier, avait annoncé lundi avoir pris la «terrible décision» de fermer jusqu'à nouvel ordre la médiathèque Marc Bernard, l'un des derniers services publics de Pissevin, quartier aux nombreuses barres d'immeubles et de tours. «Depuis décembre dernier, des dealers exercent une pression de plus en plus forte sur le quartier avec l'instauration de barricades/checkpoints pour encadrer leur commerce illicite. Ainsi, depuis plusieurs mois, les 18 agents du centre culturel sont victimes de menaces et d'agressions verbales au vu et au su de tous», a détaillé Jean-Paul Fournier dans un communiqué.

«Palpations en pleine rue»

«Aujourd'hui, ils font même l'objet de contrôles et de palpations en pleine rue avant d'accéder à leur poste de travail. Un nouveau palier a été franchi puisque les trafiquants ont pénétré dans le bâtiment, allant jusqu'à filmer et photographier le personnel, et accédant au toit pour surveiller les alentours et prévenir de l'arrivée des forces de police», s'est également offusqué le maire, en réclamant «l'affectation de façon quasi-permanente d'une Unité de Force Mobile» à Pissevin.

La procureure de Nîmes, Cécile Gensac, a annoncé avoir ouvert une «enquête préliminaire» sur les faits concernant la médiathèque et une «enquête de flagrance» pour ceux dont a été victime le journaliste de M6. «Tout signe de recul des services publics marque un échec, même temporaire, de l'action commune de tous les acteurs. Il s'agit d'un sujet de préoccupation quotidien et prioritaire pour la justice», a ajouté Cécile Gensac. Elle a souligné que, depuis un an, «138 jugements concernant 66 auteurs ont été rendus» en matière de stupéfiant à Nîmes, «soit une hausse de 253,7% des décisions de condamnations pénales».

Les dealers déplacés

La préfète du Gard, Marie-Françoise Lecaillon, a pour sa part annoncé une «intensification» de la présence de la police nationale, en lien avec la police municipale et en coordination avec la procureure, avec «une montée en puissance dans la perspective de la réouverture prochaine de la médiathèque». Selon la préfète, ces violences «interviennent dans un contexte de guerre de territoire» et «se développent en réaction aux opérations de police et au démarrage des ambitieux travaux de renouvellement urbain» dans le quartier.

Ces travaux, dotés de millions d'euros et ayant pour «objectif d'améliorer les conditions de vie des habitants», ont pour «premier effet de déstabiliser le trafic des dealers dans leurs zones d'implantation, avec un report vers d'autres lieux dont les environs de la médiathèque municipale», a-t-elle souligné. Pissevin, tout comme les quartiers du Chemin Bas et du Mas de Mingue, ont été créés dans les années 1960 pour loger des populations issues de l'exode rural, des rapatriés d'Afrique du Nord puis des travailleurs immigrés. Tous trois partagent des indicateurs socio-économiques alarmants avec un taux de pauvreté atteignant jusqu'à 70% et un chômage massif.

Source: Le Figaro