" Il était une fois… “Grâce à Dieu” ", sur Arte : retour sur le tournage du film de François Ozon
François Ozon (de face), réalisateur de « Grâce à Dieu » (2018), dans « Il était une fois… “Grâce à Dieu” » (2023), réalisé par Claire Duguet. MANDARIN PRODUCTION
ARTE – MERCREDI 7 JUIN À 23 H 10 – DOCUMENTAIRE
Au commencement, François Ozon avait voulu faire de son film Grâce à Dieu (2018) un documentaire. Son propos revenait sur la décision prise, en 2015, par des victimes d’attouchements et de viols commis par le père Preynat, lors de camps scouts dans la région lyonnaise, de 1970 à 1991, de porter plainte devant les tribunaux.
Après avoir rencontré les victimes, François Ozon s’entend répondre par ceux qui avaient déjà beaucoup raconté leur histoire aux caméras de télévision : « Encore un doc ! » Le réalisateur, catholique, catéchisé et qui dit être toujours sensible au décorum sacerdotal, bifurque alors vers un film de fiction. Grâce à Dieu conserve une partie des noms des protagonistes de l’affaire, mais Ozon confie avoir dû faire « le deuil des personnes réelles ».
C’est ce que raconte le documentaire Il était une fois… « Grâce à Dieu » (2023), de Claire Duguet, avec le concours de deux plaignants, Alexandre Hezez, par qui l’omerta fut brisée, et François Devaux, première victime dont l’affaire n’est pas prescrite, ainsi que le réalisateur, le producteur du film, trois de ses acteurs (Swann Arlaud, Denis Ménochet et Melvil Poupaud) et Jean-Marc Sauvé, président de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise catholique.
Lire le portrait (2021) : Article réservé à nos abonnés Jean-Marc Sauvé, le confesseur des violences sexuelles de l’Eglise Ajouter à vos sélections Ajouter à vos sélections Pour ajouter l’article à vos sélections
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Ces témoignages, complétés par des extraits du film (diffusé par Arte en première partie de soirée), s’accordent à dire que la faute revient, au fond, moins au père Preynat, qui a volontiers reconnu les faits, qu’à ceux qui entretinrent la non-dénonciation au sein de l’archidiocèse lyonnais, dont le cardinal et archevêque Philippe Barbarin, condamné en première instance pour « non-dénonciation d’agressions sexuelles sur mineurs », mais relaxé en appel.
« La nuisance du père en général »
Melvil Poupaud, qui incarne Alexandre Hezez à l’écran, voit une sorte de « mission » dans la décision d’Ozon de tourner un film de fiction sur ce sujet, et convient que sa propre foi « pouvait alimenter le personnage d’Alexandre ». « Même si, moi, je n’ai pas vécu ça, Dieu merci », dit-il.
François Ozon, dont les longs-métrages se distinguent par une variété de styles et de sujets, constate cependant que « le patriarcat au sein de l’Eglise catholique peut rappeler la nuisance du père en général, que j’ai pu montrer dans d’autres films ». Et il reconnaît s’être résolument placé « du côté des victimes ». Ce qui, ajoute-t-il, a pu lui être reproché.
Le film de Claire Duguet, sérieux et documenté, s’inscrit dans la même perspective et manque d’un regard tiers et non partisan qui permettrait de mieux saisir les enjeux d’une fiction fondée sur des faits réels. Pascale Robert-Diard l’a ainsi formulé dans Le Monde : si le film d’Ozon sert « l’intérêt légitime du public pour l’histoire vraie des anciens scouts (…), leur combat pour faire reconnaître la culpabilité de Bernard Preynat et dénoncer le silence de l’Eglise », il use libéralement de « la liberté que lui donne la fiction de créer des scènes, des dialogues, et de prêter des sentiments ou des attitudes à ses personnages ».
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Source: Le Monde