L’intenable proximité sud-africaine avec la Russie

June 09, 2023
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Officiellement, l’Afrique du Sud prévoit toujours d’accueillir le sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) en août, auquel elle a invité Vladimir Poutine, en dépit du mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre qui le vise. Pour combien de temps ? Alors que le gouvernement sud-africain indique « envisager toutes les options », y compris celle de délocaliser l’événement pour s’extraire de ce bourbier, le dilemme illustre la position intenable du pays en matière de politique étrangère, dans le contexte de la guerre en Ukraine.

« Si cela ne dépendait que du Congrès national africain [ANC], nous voudrions que le président Poutine soit là demain. » Fin mai, Fikile Mbalula, le secrétaire général de l’ANC, le parti au pouvoir depuis la chute de l’apartheid, ne faisait pas mystère de sa volonté d’accueillir le président russe. Pourtant, le pays est signataire du statut de Rome, qui l’oblige à respecter les décisions de la CPI.

« Non aligné », le gouvernement sud-africain a toujours refusé de qualifier d’agression l’invasion de l’Ukraine par la Russie, s’abstenant de voter les résolutions des Nations unies en ce sens. « L’Afrique du Sud n’a pas été et ne sera pas entraînée dans une compétition entre puissances mondiales », répétait le président Cyril Ramaphosa, le 24 mai, en appelant à une « résolution pacifique » du conflit.

Les actes du gouvernement sud-africain depuis le début de la guerre racontent une autre histoire. La ministre des affaires étrangères, Naledi Pandor, affiche une proximité sans réserve avec le ministre des affaires étrangères russes, Sergueï Lavrov, chaleureusement accueilli à Pretoria en janvier. La même ne perd jamais une occasion de critiquer les Etats-Unis et leurs alliés européens, accusés de presser leurs partenaires africains de choisir un camp.

Exercices militaires conjoints

La tension entre l’Afrique du Sud et ses partenaires occidentaux est montée d’un cran en février, quand le pays a accueilli des exercices militaires avec la Russie, le jour du premier anniversaire de l’invasion russe en Ukraine. Deux mois plus tôt, l’ANC, dont les positions définissent la politique du gouvernement, adoptait une résolution assurant que « les Etats-Unis ont provoqué la guerre avec la Russie en Ukraine, dans l’espoir de remettre la Russie à sa place ». Une vision conforme à celle de Moscou.

Les liens forgés au temps où l’Union soviétique portait à bout de bras la lutte du parti de libération de l’Afrique du Sud contre l’apartheid sont souvent invoqués pour expliquer la proximité du régime sud-africain avec Moscou. Plus récemment, l’ANC, ruiné, a bouclé l’année 2022 grâce à une donation de près de 800 000 dollars (plus de 740 000 euros) d’une société liée à un oligarque russe sanctionné par les Etats-Unis.

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Source: Le Monde