Retraites : ces autres réformes qui se profilent
1 Agirc-Arrco : un pactole à partager
La grande caisse déborde. L’Agirc-Arrco, régime complémentaire des salariés du privé, qui, chaque année, verse plus de 87 milliards d’euros de pensions à 13 millions de retraités, dégage même de copieux excédents : 2,6 milliards d’euros en 2021, plus de 5 milliards en 2022.
Ses comptes devraient rester durablement dans le vert, à en croire les prévisions du gouvernement, qui, en janvier, tablait sur un surplus de 1,7 milliard pour l’Agirc-Arrco cette année et jusqu’à 6 milliards en 2030, grâce au report de l’âge légal à 64 ans. Une manne dont ce régime, géré par les partenaires sociaux, n’a pas vraiment besoin, puisque ses abondantes réserves financières suffisent déjà à garantir sa « règle d’or » : disposer de six mois d’avance sur un horizon de 15 ans.
Heureux hasard du calendrier, le dernier accord-cadre conclu en 2019 arrive à échéance cet automne. La négociation, qui devait débuter avant l’été, pourrait être reportée à la rentrée, selon plusieurs sources contactées par l’AFP.
Avec de telles marges de manœuvre, les syndicats devraient obtenir sans peine la suppression du « bonus-malus » censé inciter les salariés à partir plus tard - mais qui n’a pas eu l’effet escompté. La question d’une hausse des pensions, comme celle d’une baisse des cotisations, sera sans doute aussi mise sur la table.
2 Fonctionnaires : une caisse au bord du gouffre
En revanche, tous les voyants sont au rouge pour la caisse des agents territoriaux et hospitaliers. La CNRACL accumule les pertes (4,5 milliards d’euros en trois ans) et son déficit devrait se creuser « fortement » cette année, à 2,8 milliards, d’après la Commission des comptes de la Sécurité sociale.
À moyen terme, les pertes vont continuer de s’accroître
C’est le résultat d’un piège démographique : le nombre de retraités (1,3 million) progresse de plus de 3 % par an, quand celui des cotisants (2,2 millions) stagne depuis une décennie. Et le pire est à venir, car « les pertes vont continuer de s’accroître à moyen terme » malgré la réforme des retraites, selon l’Exécutif, qui a pourtant prévu une hausse des cotisations dès l’an prochain pour ce régime. Une hausse « largement insuffisante pour couvrir (celle) du déficit », qui continuera donc d’augmenter « pour atteindre 6,6 milliards d’euros en 2030 », souligne la Cour des comptes, inquiète d’une situation « de plus en plus préoccupante ».
Aucune solution ne se dégage pour le moment. Relever encore le taux de cotisation ou augmenter les salaires pèserait sur les finances des collectivités et des hôpitaux - donc, de l’Assurance maladie. Une reprise de dette (comme pendant la covid) allégerait le fardeau, mais ne réglerait pas le fond du problème.
3 Mères, veuves : un chantier à haut risque
Conscient de marcher sur des œufs, le gouvernement n’a pas tout mis dans le panier de sa réforme. Les « droits familiaux » et les pensions de réversion devaient ainsi faire l’objet de travaux spécifiques, avec, en ligne de mire, le budget 2024 de la Sécu qui sera présenté en septembre. Mais, depuis plusieurs mois, l’Exécutif reste silencieux sur ces sujets aux énormes enjeux budgétaires (20 milliards d’euros pour le premier, 37 milliards pour le second) et politiques, ces dispositifs bénéficiant essentiellement aux femmes.
Un public loin d’être acquis, après une réforme contestée, notamment pour son manque d’équité envers les femmes, qui devront allonger leur carrière davantage que les hommes - même si cela va un peu réduire les écarts de pension.
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Au risque de rouvrir la boîte de Pandore, le gouvernement a avancé une première piste : transformer les trimestres accordés aux mères de famille en « bonification » sonnante et trébuchante dès le premier enfant. Idée approuvée par la Cour des comptes, à condition de la mettre en œuvre « à coût constant ». Une méthode qui ferait nécessairement des gagnantes et des perdantes.
Source: Le Télégramme