A Grenoble, l’agrandissement de STMicroelectronics relance la question du partage de l’eau
Les travaux d’agrandissement de l’usine de semi-conducteurs STMicroelectronics, à Crolles (Isère), le 3 mai 2023. FRANCOIS HENRY/REA
C’est une aide conséquente qu’a annoncée le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, lundi 5 juin, allouée par l’Etat pour l’agrandissement de l’usine iséroise de STMicroelectronics, soit 2,9 milliards d’euros. L’industriel franco-italien, installé à Crolles, dans la vallée du Grésivaudan (Isère), à 15 kilomètres de Grenoble, produit les précieux semi-conducteurs, matériaux de base des puces électroniques utilisées dans de nombreux secteurs stratégiques (aéronautique, automobile, télécommunications…).
Le projet, chiffré à un total de 7,5 milliards d’euros, a été officialisé en juillet 2022, avec la venue d’Emmanuel Macron sur le site isérois de l’industriel. L’enjeu dépasse largement les frontières françaises, le projet de ST s’inscrivant dans la stratégie européenne « Chips Act », qui vise à doubler les parts de l’Union européenne sur le marché des semi-conducteurs d’ici à 2030, face aux géants chinois et américains.
29 000 m3 d’eau par jour
Dans la région grenobloise, l’agrandissement de l’usine – sur l’emprise actuelle du site – a immédiatement posé la question du partage de l’eau, après un été 2022 marqué par la sécheresse et des arrêtés de restriction d’usage de l’eau. « Nous sommes assis sur un trésor », reconnaît Christophe Ferrari, président (ex-Parti socialiste) de la métropole grenobloise, qui compte 450 000 habitants. La capitale des Alpes jouit d’une eau abondante et pure provenant des glaciers et qui nécessite très peu de traitements. Et les nombreux industriels installés autour de Grenoble ne s’y sont pas trompés.
Une abondance dont profite STMicroelectronics, son activité étant très consommatrice en eau. Les wafers (disques semi-conducteurs) de silicium qu’elle produit sont traités avec des produits chimiques, puis rincés à l’eau ultra-pure – de l’eau potable déminéralisée et entièrement débarrassée de ses impuretés. L’eau est aussi employée pour la climatisation des bâtiments. Alimentée par la métropole de Grenoble, l’usine de STMicroelectronics avait à elle seule utilisé 6,8 millions de mètres cubes d’eau potable en 2022, soit 20 % de la ressource fournie par la métropole grenobloise, la quasi-totalité de ce volume étant ensuite rejeté dans l’Isère après traitement.
En octobre 2021, une convention d’achat avait été signée entre la métropole de Grenoble et le Grésivaudan, où se situe l’usine, actant d’une fourniture de 29 000 m3 d’eau par jour pour STMicroelectronics d’ici à fin 2023, contre 23 000 m3 jusqu’alors. Un volume contraint par les capacités techniques des canalisations de la métropole… mais aussi par choix politique. S’ils se réjouissent de la réindustrialisation et des emplois créés par ST, les élus écologistes et de gauche de la métropole grenobloise affichent leur vigilance quant à l’impact de l’activité de l’industriel sur l’environnement. « L’eau, ce n’est pas open bar », souligne Christophe Ferrari, qui assure cependant que l’industriel ne l’a, à ce jour, pas sollicité pour en obtenir davantage.
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Source: Le Monde