" L’ouverture à la concurrence du marché de l’énergie, électricité ou gaz, a connu son crash-test "

June 12, 2023
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La station de compression de gaz exploitée par le gestionnaire de transport de gaz GRTGaz, à Morelmaison (Vosges), en octobre 2022. SEBASTIEN BOZON / AFP

En français, on appelle cela un essai de choc. Plus connu sous son patronyme anglo-saxon de crash-test, cela consiste à projeter une voiture contre un mur afin d’en évaluer les dégâts. L’ouverture à la concurrence du marché de l’énergie, électricité ou gaz, a connu son crash-test en vraie grandeur.

En propulsant les prix du gaz, puis de l’électricité, vers des sommets historiques, la crise née du conflit en Ukraine a permis de vérifier ce que beaucoup avaient anticipé : la concurrence n’a pas été d’un grand secours. Et la fin des tarifs réglementés du gaz au 1er juillet devrait encore alourdir un bilan bien mince, en se traduisant par une nouvelle augmentation des prix.

L’envolée des factures depuis un an a plongé dans la précarité énergétique plus d’un quart des Français et un tiers des jeunes, selon le baromètre du médiateur de l’énergie. Ce dernier a enregistré plus de 30 500 litiges cette année, un nombre doublé depuis 2017. Le manque d’information sur les changements de prix, les modifications des contrats en cours, les mauvaises pratiques sont monnaie courante et expliquent le reflux des consommateurs vers les opérateurs historiques, EDF pour l’électricité et GRDF (Engie) pour le gaz.

Le précédent des télécoms

Pourtant, quand la libéralisation du marché a démarré en 1999, l’espoir était de redonner de la liberté et du pouvoir d’achat aux Européens grâce au développement de la concurrence. Celle-ci était supposée être l’instrument d’un marché européen de l’énergie, porteur de plus d’efficacité et de sécurité pour les consommateurs, entreprises ou particuliers. Avec comme modèle la libéralisation du marché des télécommunications, qui s’est traduite par des tarifs européens parmi les moins chers du monde, et un vent d’innovation spectaculaire.

Cela ne s’est pas produit avec l’énergie. Pourtant, dans les deux cas, l’Etat n’a pas ménagé sa peine, créant des instances de régulation, une séparation des réseaux et des services, des médiateurs de toutes sortes et un cadre protecteur du consommateur. Mais la révolution télécoms s’était accompagnée d’un bouleversement technologique sans précédent, avec l’avènement du téléphone mobile, puis de l’accès Internet. Ces deux vagues successives ont élargi l’horizon et permis aux nouveaux entrants d’innover sur les services et sur les tarifs.

Finalement, les gagnants ont été ceux qui ont réussi à négocier le passage du statut de simple revendeur à celui d’opérateur disposant de son réseau physique. Dans le domaine de l’énergie, la plupart des nouveaux entrants n’ont pas quitté le stade de simples courtiers aux marges aussi minces que leurs slogans écologiques. En attendant la révolution des énergies alternatives, il faudra continuer d’être vigilant en regardant ses factures.

Source: Le Monde