Qui est Mgr Georges Colomb, évêque de La Rochelle et Saintes, mis en cause dans l’enquête des MEP ?
Un évêque dans la tourmente. Le 24 mai dernier, une enquête préliminaire a été ouverte à l’endroit de Mgr Georges Colomb, 69 ans, évêque de La Rochelle et Saintes, par le parquet de Paris. Les faits ont été révélés mardi 13 juin par la publication d’enquêtes dans plusieurs médias catholiques dont La Croix. Cette procédure judiciaire a été lancée après un signalement, quelques jours plus tôt, effectué par les Missions étrangères de Paris (MEP) ayant reçu le témoignage de Nicolas (1).
Quelques heures après la publication de ces enquêtes, Mgr Georges Colomb a indiqué par un communiqué son intention de demander au pape François sa mise en retrait provisoire, le temps de l’enquête judiciaire, tout en restant évêque de La Rochelle et Saintes. Un administrateur diocésain devrait toutefois être nommé pour en assurer la gouvernance.
Missionnaire en Chine
Sur les faits qui lui sont reprochés, l’actuel évêque nie avec force, se disant « choqué » par ces accusations. «Je conteste vigoureusement avoir proposé et encore moins prodigué des massages à ce monsieur ou avoir essayé de l’agresser au plan sexuel ou d’une autre manière », s’est-il défendu auprès de La Croix.
Né en 1953 dans le Puy-de-Dôme, Georges Colomb poursuit des études de droit et d’administration économique et sociale. Il travaille d’abord durant cinq années en tant qu’inspecteur des Postes et télécommunications. Puis, interpellé par les tragédies des boat people, ces frêles embarcations à bord desquelles les migrants d’Asie du Sud-Est quittaient les pays communistes comme le Vietnam, le Cambodge ou le Laos, il décide d’entrer au séminaire des Carmes et aux MEP, à l’âge de 29 ans, pour se mettre au service des chrétiens persécutés d’Extrême-Orient. « Les réfugiés d’Asie qui arrivaient nombreux en Europe dans les années 1975-1980 ont été pour moi un appel », confiait-il à l’occasion de sa nomination à La Rochelle.
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Ordonné en 1987 pour les MEP, il reçoit la Chine comme pays de mission. Avant d’y être envoyé, il part deux ans à Taïwan afin d’apprendre le mandarin. Il rejoint son affectation en 1990, en République populaire de Chine. L’accès au pays étant impossible pour les missionnaires, il s’y rend avec le statut d’« expert étranger » et enseigne le français dans les universités de Dalian (nord-est) et de Kunming, dans la province du Yunnan (sud-ouest), proche de la frontière birmane.
Responsabilités aux MEP
Rappelé en 1998 à Paris, le père Colomb est nommé assistant du supérieur général des MEP de l’époque, le père Jean-Baptiste Etcharren. Il prend également en charge le service des vocations et les séminaristes de la société de vie apostolique fondée en 1658. Il fonde en 2002 le Volontariat MEP, qui envoie chaque année plus d’une centaine de jeunes en Asie et dans l’Océan indien pour des missions d’enseignements, d’animation ou de gestion de projet. Le succès de cette initiative participe au renouveau des MEP, dont les vocations se raréfiaient depuis les années 1970.
Le père Colomb est ensuite est nommé vicaire général de la société en 2004, tout en conservant ses responsabilités pour les vocations. Six ans plus tard, il est élu supérieur général de l’institution de la rue du Bac. Dans ses fonctions, il poursuit ses efforts pour les vocations et l’évangélisation, en créant par exemple un volontariat Senior. « Il poussait ceux qu’il jugeait aptes à entrer au séminaire, notamment au sein des volontaires laïcs », explique à La Croix un ancien volontaire.
Un enthousiasme dans le recrutement qui a parfois fait grincer des dents en interne, certains jugeant que le père Colomb acceptait des candidats déjà passés - sans succès - par plusieurs séminaires diocésains.
Épiscopat
En 2016, il est nommé par le pape François évêque de La Rochelle et Saintes, charge qui s’élargit en 2018 avec l’intégration de l’île de Saint-Pierre-et-Miquelon. Face à la diminution du clergé diocésain, Mgr Colomb multiplie les projets missionnaires et relance les vocations dans son diocèse en faisant notamment appel à des forces vives extérieures. D’un seul séminariste à son arrivée, le séminaire compte deux ans plus tard 10 candidats à la prêtrise : 5 Européens dont 3 Français, 1 Vietnamien et 4 Africains formés en France. Fort de son expérience missionnaire, il est nommé président des Œuvres pontificales missionnaires en France en 2020.
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Ces derniers mois, le nom de l’évêque de La Rochelle a été associé à plusieurs reprises à des affaires d’abus sexuels. Il lui est notamment reproché d’avoir confié, à l’époque où il était supérieur général des MEP, la responsabilité des séminaristes et des jeunes volontaires de la rue du Bac au père Aymeric de Salvert, alors que ce dernier avait été renvoyé du Japon en 2011 après avoir eu une relation sexuelle consentie avec un autre homme majeur.
« Cela n’aurait pas été honnête de le remettre en paroisse et je venais d’ouvrir un foyer vocationnel pour jeunes : je lui en ai confié la charge. Je ne voulais pas lui faire perdre la face devant ses confrères », expliquait Mgr Colomb à La Croix en avril dernier, après que le père de Salvert a été placé en garde à vue, suspecté de « viol aggravé » pour des faits remontant à 2015.
En novembre 2022, interrogé par RCF sur l’affaire du cardinal Ricard, Mgr Colomb avait suscité la polémique, semblant relativiser les faits reprochés à l’ancien archevêque de Bordeaux. « Le cardinal Ricard, jeune prêtre de 35 ans à Bordeaux a embrassé une jeune fille de 14 ans, déclarait-il. (…) Il n’y a eu aucun viol. Il ne l’a même pas dévêtue. Il ne l’a pas déshabillée. Il l’a embrassée. (…) »
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L’évêque de La Rochelle avait également avancé l’hypothèse d’« une relation », « d’un sentiment d’amour de la part du cardinal », pour comparer cette affaire avec les faits reprochés à Mgr Michel Santier, accusé d’abus spirituels et sexuels. Une déclaration qui avait donné lieu à un rétropédalage deux jours plus tard, dans lequel il affirmait que « s’agissant d’enfants mineurs, il n’est pas possible de faire le tri selon la gravité des faits ».
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Source: La Croix