Fonds Marianne : devant les sénateurs, Mohamed Sifaoui s’estime " manipulé par le pouvoir politique "
Mohamed Sifaoui avant son audition par la commission d’enquête du Sénat à propos du fonds Marianne, à Paris, le 15 juin 2023. BERTRAND GUAY / AFP
« La première erreur que j’ai faite, c’est d’avoir fait confiance à Mme Schiappa. » Mohamed Sifaoui est très remonté, jeudi 15 juin, lorsqu’il conclut son audition devant la commission d’enquête sur le fonds Marianne, cette manne de 2,5 millions d’euros mise en place par Marlène Schiappa, alors ministre déléguée à la citoyenneté, à la suite de l’assassinat terroriste du professeur Samuel Paty, en octobre 2020, afin de créer un « contre-discours républicain » sur les réseaux sociaux.
L’association de l’essayiste, l’Union des sociétés d’éducation physique et de préparation militaire (USEPPM), a bénéficié de la part la plus importante du fonds, 355 000 euros, essentiellement dépensés en salaires, pour un résultat unanimement qualifié de peu concluant, consistant en quelques dizaines de tweets, dont certains s’en prenaient à des personnalités politiques. Ce sont surtout les conditions d’attribution de la subvention qui sont au cœur du scandale, objet d’une enquête administrative diligentée par l’inspection générale de l’administration (IGA), mais aussi d’une instruction judiciaire lancée par le Parquet national financier – qui a perquisitionné, mardi, le domicile de M. Sifaoui – et de la commission d’enquête sénatoriale, où l’essayiste a tenté de se justifier, jeudi.
S’il a d’abord maintenu une façade de calme, le ton est très vite monté lorsque M. Sifaoui s’en est pris à plusieurs sénateurs, dont le rapporteur de la commission, Jean-François Husson (Les Républicains, Meurthe-et-Moselle). « Ce que vous dites est ridicule. (…) J’exige du respect ! », s’est emporté M. Sifaoui, qui s’en est également pris au rapport « pathétique » rendu par l’IGA. « Vous devriez garder vos nerfs », lui a calmement répondu le sénateur Husson.
« J’ai une capacité de travail supérieure à la normale »
Susceptible, Mohamed Sifaoui n’en a pas moins confirmé l’essentiel des points apparus au fil des révélations de ce feuilleton : d’une part, sa proximité déjà ancienne avec le Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), organisme placé sous la tutelle de Mme Schiappa et qui pilotait le fonds Marianne.
M. Sifaoui, qui a vanté sa longue pratique des cabinets ministériels et sa prescience sur la montée du terrorisme djihadiste – « on me prenait pour un cinglé quand je disais qu’il allait y avoir des attentats » –, y fréquentait déjà Frédéric Rose, le prédécesseur du préfet Christian Gravel, qui a démissionné à la suite de la publication du rapport de l’IGA, le 6 juin, à la tête de l’organisme. « A partir de l’été 2020, avec la nomination de Marlène Schiappa », M. Sifaoui dit avoir été contacté par ses collaborateurs pour des échanges « réguliers entre les mois de septembre [2020] et de mars [2021] », autour de la loi « séparatisme », que prépare alors la ministre, mais aussi de « pistes » de travail sur le « contre-discours républicain ».
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Source: Le Monde