Renseignements : la commission de contrôle s’alarme de la hausse des demandes concernant l’activisme politique

June 15, 2023
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Pour qu’une alerte soit entendue, encore faut-il qu’elle fasse du bruit. Il est peu probable que celle lancée par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), dans son rapport annuel 2022, résonne dans le débat public. C’est dommage. Née, fin 2015, de la toute première loi sur le renseignement et seul contre-pouvoir indépendant à la surveillance d’Etat, la CNCTR veille sur les faits et gestes des services secrets français. Dès qu’ils utilisent une technique pour collecter des informations – écoutes, géolocalisation, données informatiques, captation d’image et de son, etc. –, ils doivent solliciter l’avis consultatif de la CNCTR.

Or, cette instance s’inquiète sérieusement, aujourd’hui, de sa capacité à mener à bien sa mission alors que la technologie dépasse ses moyens et que le champ de son contrôle est contraint par une loi d’un autre âge. La CNCTR se décrit comme une structure pensée pour les techniques du XXe siècle en veillant au grain d’une surveillance du XXIe siècle. Sur le fond, elle souligne, par ailleurs, le vide doctrinal des autorités françaises sur des sujets pourtant centraux comme l’activisme politique.

En 2022, la CNCTR dit, en effet, avoir dû hausser le ton face aux services de renseignement sur la question des violences dites « collectives » derrière lesquelles se cachent les manifestations qui tournent mal, les occupations de chantiers d’autoroute et de bassins de rétention d’eau ou les opérations d’occupation de bâtiments publics. « La commission, détaille son président, Serge Lasvignes, s’est, en particulier, attachée à la balance entre nécessité du renseignement et protection, non seulement de la vie privée mais aussi des libertés d’expression et de réunion. »

« Motivations parfois trop abstraites »

Si la part des techniques utilisées sur les affaires de violences « collectives » est de 12 %, la CNCTR souligne avoir été obligée de multiplier pour cette finalité, plus que pour toute autre, les rappels à l’ordre et les demandes d’informations complémentaires « pour apprécier le bien-fondé » des requêtes « aux motivations parfois trop abstraites, voire stéréotypées ». Elle dit avoir souvent assorti ses avis favorables de « réserves et conditions visant à limiter l’impact de la technique : réduction de la durée d’autorisation, par exemple, ou prévention d’un éventuel impact sur l’entourage ». Enfin, l’augmentation du nombre d’avis défavorables, 629 cas en 2022, « a essentiellement concerné des demandes présentées au titre de la prévention des violences collectives ».

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Source: Le Monde