L'inflation continue de ralentir dans la zone euro

June 17, 2023
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Par Marine BOURRIER, Sébastien Dumoulin

Publié le 16 juin 2023 à 18:55 Mis à jour le 16 juin 2023 à 19:16

Bonne nouvelle sur le front de l'inflation en Europe : la baisse des prix observée ces derniers mois se poursuit. Selon les dernières données d'Eurostat, le taux d'inflation annuel dans les vingt pays de la zone euro est tombé à 6,1 % en mai 2023 . C'est le plus faible glissement annuel depuis plus d'un an et une confirmation du net repli de l'inflation entamé à l'automne dernier, après son pic de 10,6 % en octobre.

Si l'inflation reste élevée - et encore très loin de l'objectif de la Banque centrale européenne (BCE) de la ramener à 2 % à l'horizon 2025 - c'est aujourd'hui principalement du fait de la valse des étiquettes alimentaires. Les prix de la nourriture, de l'alcool et du tabac étaient le premier contributeur au taux d'inflation de la zone euro en mai (+2,5 points de pourcentage). A l'inverse, le recul des prix du carburant sur un an fait que les prix de l'énergie contribuent désormais négativement au taux d'inflation (-0,1 point de pourcentage).

Flambée de la carte

Autre signal positif, l'inflation sous-jacente (à savoir l'évolution du prix des biens manufacturés et des services - moins volatile que le prix du carburant ou de la nourriture) est également en reflux. « C'est largement lié aux prix des biens de consommation - hors énergie et produits alimentaires, pointe Ariel Emirian, chef analyse macroéconomique de Société Générale. Les chaînes d'approvisionnement se normalisent et les difficultés à se procurer certains biens intermédiaires, comme les semi-conducteurs par exemple, dont les coûts avaient beaucoup augmenté, se résorbent. De plus, la demande de biens commence à se tasser. »

Ce n'est pas encore le cas pour les services. La hausse du prix de ces derniers contribue encore fortement à l'inflation dans la zone euro (+2,2 points de pourcentage). Pour simplifier, la flambée de la carte au restaurant pèse aujourd'hui davantage sur le porte-monnaie des Européens que la hausse du prix des téléviseurs. Mais cela pourrait rentrer dans le rang prochainement. « Nous nous attendons à ce que les pressions de demande se tassent, avec l'érosion de l'excès d'épargne accumulé pendant la période Covid et avec la contraction anticipée du marché de l'emploi », explique Ariel Emirian.

Relèvement des taux

Ce scénario est en tout cas celui que tente de faire advenir la BCE. Le reflux de l'inflation dans la zone euro est une bonne nouvelle pour l'institution de Francfort, qui n'estime pas pour autant que la bataille est gagnée. Jeudi, la Banque centrale européenne a ainsi relevé ses taux directeurs d'un quart de point, pour la huitième fois d'affilée.

Sa présidente, Christine Lagarde, ne voit pas de signes clairs que l'inflation sous jacente (hors prix de l'énergie et de l'alimentation) a atteint son pic et s'inquiète des pressions inflationnistes provoquées par les hausses de salaires en Europe. Un nouveau rehaussement des taux en juillet est donc quasiment acquis et la question reste ouverte pour septembre.

La mission de la BCE - ramener l'inflation à 2 % - est compliquée par le fait que les performances des pays de la zone euro sur ce front sont disparates. Tous (à l'exception des Pays-Bas) ont vu l'inflation refluer en mai. C'est notamment le cas de la France, comme l'Insee l'a confirmé jeudi . Mais les taux d'inflation nationaux vont de 2 % au Luxembourg à plus de 10 % dans les pays baltes comme en Pologne et jusqu'à… 21,9 % en Hongrie.

D'autres observateurs pointent aussi que l'inflation aura du mal à complètement s'effacer. La relocalisation des industries par exemple, après le Covid ou face à la montée des tensions sino-américaines - renchérit inévitablement la production.

« A moyen terme, on ne pourra pas revenir à la situation pré-Covid sur le front de l'inflation, qui restera au-dessus des cibles des banques centrales, pronostique Ariel Emirian. La transition climatique notamment exercera une pression inflationniste significative. Il suffit pour s'en convaincre de regarder l'explosion de la demande de métaux qui ira de pair avec l'électrification des voitures. »

Source: Les Échos