Entre Emmanuel Macron et " MBS ", des intérêts pas toujours convergents

June 17, 2023
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Emmanuel Macron et le prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salman, à l’Elysée, le 16 juin 2023. LUDOVIC MARIN / AFP

Le déjeuner de travail avec le président français Emmanuel Macron, vendredi 16 juin à l’Elysée, était une forme de mise en bouche. En pleine offensive diplomatique, le prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salman, entend mettre à profit la semaine qu’il passera dans la capitale française pour promouvoir la candidature de Riyad à l’organisation de l’Exposition universelle de 2030. L’heure n’est plus pour lui, comme lors de sa venue en France en juillet 2022, sous les huées des organisations de défense des droits de l’homme, de tenter de réhabiliter son image à l’étranger après le meurtre par des agents dépêchés de Riyad, en 2018, du journaliste Jamal Khashoggi au consulat saoudien à Istanbul (Turquie).

Malgré une réputation qui reste entachée par cet événement, le prince de 37 ans, surnommé « MBS », se sait aujourd’hui incontournable et déploie une diplomatie tous azimuts dans le but de promouvoir les intérêts économiques du royaume et Vision 2030, sa stratégie de développement post-pétrole.

« Le prince héritier saoudien monte en puissance, il s’autonomise des Etats-Unis et, au Moyen-Orient, rien ne se fait sans les Saoudiens. C’est donc important de le voir, c’est de la realpolitik. Mais faut-il s’attendre à des percées, comme sur le dossier libanais ? Je ne le crois pas », commente un bon connaisseur du dossier.

Le tête-à-tête à l’Elysée entre Mohammed Ben Salman et Emmanuel Macron, qui se parlent régulièrement au téléphone, a été l’occasion de faire un tour d’horizon des relations bilatérales et des dossiers du moment. L’Elysée avait promis que serait soulevée la question des exécutions, après qu’Amnesty International a alerté sur « une escalade effrayante de l’utilisation déjà record de la peine de mort » et, notamment, sur le sort de sept jeunes Saoudiens, condamnés à mort pour « de soi-disant crimes » commis quand ils étaient mineurs. Les exécutions ont été multipliées par sept au cours des trois dernières années. Dans un communiqué diffusé après la rencontre, l’Elysée s’est contenté de mentionner « l’attachement de la France aux valeurs universelles ».

L’espoir que MBS fasse pression sur la Russie

Sur l’Ukraine, un dossier prioritaire pour Paris, le président Macron essaie de convaincre l’Arabie saoudite d’user de son influence auprès de la Russie pour dessiner une sortie de crise qui préserve la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Dans le cadre de son partenariat avec Moscou au sein de l’OPEP+ – l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et de leurs alliés –, Riyad continue néanmoins de ménager à la Russie sa part de quotas tout en réduisant sa production pour maintenir élevés les cours de l’or noir. L’invitation faite par MBS au président Volodymyr Zelensky à s’adresser à la Ligue arabe, à Djedda, le 19 mai, a été saluée comme un « tournant » par M. Macron. « L’Arabie saoudite est l’un des rares pays à pouvoir tenir le rôle de médiateur entre la Russie et l’Ukraine car elle parle aux deux », suggère l’analyste saoudien Mohammed Alyahya, rattaché à la Harvard Kennedy School.

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Source: Le Monde