San Juan, Nanggala, Koursk... Ces naufrages de sous-marins qui font craindre le pire pour le submersible disparu près du Titanic

June 19, 2023
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Des recherches sont en cours pour retrouver un petit submersible touristique au cœur de l'océan Atlantique. Par le passé, des engins mieux équipés et plus surveillés ont tragiquement fait naufrage.

Mais où est donc passé le sous-marin touristique d'OceanGate Expeditions? Le submersible a disparu des radars ce lundi 19 juin, alors qu'il se rendait dans la zone du naufrage du Titanic , coulé le 10 avril 1912. Des recherches sont menées par les garde-côtes américains et le Canada pour retrouver le navire immergé au cœur de l'océan Atlantique, au large de l'Amérique du nord.

Les autorités espèrent évidemment retrouver le sous-marin intact, et son équipage en bonne santé. Mais le temps des investigations est compté: ce petit navire de 6,70 mètres de longueur, qui transporterait à son bord cinq personnes (un pilote et quatre équipiers, dont l'auteur français Paul-Henri Nargeolet), n'aurait que 96 heures de réserves d'oxygène, selon le site internet d'OceanGate Expeditions.

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Le cas tragique du San Juan

Par le passé, d'autres sous-marins, autrement mieux équipés et surtout beaucoup plus grands, n'ont pas pu échapper aux abysses. C'est le cas du San Juan, immense submersible de la marine argentine, porté disparu le 17 novembre 2017 à 430 kilomètres des côtes de la Patagonie. Ce navire de type TR-1700, conçu en Allemagne et mesurant plus d'une soixantaine de mètres, transportait à l'époque 44 passagers. Il disposait pour tout l'équipage d'une semaine de réserves d'oxygène.

Un navire participant aux recherches du San Juan, en 2017. HO / AFP

À l'annonce de sa disparition, la marine argentine envoie un destroyer, deux corvettes et deux avions de surveillance à ses trousses. Le lendemain, dix navires, dont un Britannique, participent aux recherches, qui s'étendent sur plus de 480.000 kilomètres carrés - une surface équivalente à celle de l'Espagne. L'Otan déploie même un système mobile de sauvetage, imaginé par la France, le Royaume-Uni et la Norvège.

Mais rien n'y fait: le San Juan demeure aux abonnés absents. Les autorités reçoivent pourtant au fil des jours des tentatives d'appels de plusieurs secondes - mais rien ne prouve que l'équipage du San Juan en est à l'origine. Le 30 novembre, soit 15 jours après le début des recherches, la marine argentine perd tout espoir de retrouver le sous-marin et annonce la fin des recherches de rescapés. Le TR-1700 argentin sera finalement retrouvé un an plus tard, le 16 novembre 2018, à 800 mètres de profondeur. L'enquête déterminera qu'il a «implosé», après avoir modifié son trajet initial pour cause de court-circuit dans son système de batterie. Les experts tablent sur une entrée d'eau imprévue dans le submersible.

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Le Nanggala, tombeau de 53 marins

Le sort du KRI Nanggala, surnommé la «lance divine» de la marine indonésienne, n'est pas plus heureux. Avec un tonnage de 1100 tonnes et une mise en service 41 ans plus tôt, rien ne prédestinait ce sous-marin d'attaque conventionnel à brutalement cesser d'émettre le 21 avril 2021, lors d'un exercice de torpillage mené dans les eaux au nord de l'île touristique de Bali. À l’époque, il était en outre l'un des cinq sous-marins de l'Indonésie.

C'est après un ultime tir de torpille à 3 heures du matin, heure locale, que la marine perd le contact avec le Nanggala. Elle lance dès lors un appel de détresse international pour le retrouver: les gouvernements de l'Australie, de Singapour et de l'Inde répondent à la demande d'assistance. Rapidement, les secours, constitués de 20 navires et 4 aéronefs indonésiens, d'un bateau de guerre australien et d'un avion de reconnaissance américain, découvrent des traces d'hydrocarbures près de la zone où a plongé la «lance divine».

Ce n'est que trois jours plus tard que des débris sont retrouvés à plusieurs centaines de mètres de profondeur: un tube lance-torpille, des morceaux de tuyaux de refroidissement, du lubrifiant de périscope... Le lendemain, le 25 avril, la marine indonésienne annonce avoir retrouvé l'épave brisée en trois parties du Nanggala, à 800 mètres en dessous du niveau de la mer. Elle confirme aussi la mort des 53 membres d'équipage. La France adressera ses «plus sincères condoléances» aux familles. Pour l'état-major de la marine, le naufrage serait dû à une vague sous-marine, soit un brusque changement de densité de l'eau, en raison des différences de pression en profondeur.

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Le Koursk, 118 morts à cause d'une torpille

Le récit tragique du Nanggala rappelle d'ailleurs celui du K-141 Koursk , mythique sous-marin ultra-perfectionné de l'armée russe. Mis en service en 1994, il a sombré le 12 août 2000, emportant avec lui 118 hommes d'équipage. En cause, l'explosion d'une torpille d'exercice à bord, alors qu'elle était en cours de lancement. Long de 154 mètres, avec quatre ponts, et jaugeant 13.500 tonnes, ce submersible à propulsion nucléaire était à l'époque le fer de lance de l'URSS. Mais deux explosions l'immobilisent à seulement 108 mètres de profondeur dans la mer de Barents.

Quelques dizaines d'hommes vont survivre de nombreuses heures dans un compartiment de secours non touché par les explosions, qui ont endommagé tous les systèmes de survie du navire. Ils y attendent l'arrivée de secours. La marine russe va d'abord minimiser l'accident, évoquant des «difficultés techniques mineurs». Un navire de sauvetage ne viendra que le lendemain du drame, mais il est insuffisamment performant pour atteindre le Koursk. Ce n'est que quatre jours plus tard que la Russie accepte de l'aide britannique et norvégienne. Les bateaux de sauvetage des deux pays atteignent le lieu du sinistre le 19 août. Trop tard: ils constatent que le compartiment de secours est complètement inondé. Le Koursk sera toutefois remonté le 8 octobre 2001, plus d'un an après le naufrage. La plupart des corps seront miraculeusement identifiés.

Le Koursk, dans les années 1990, à gauche, en Russie. AFP

Deux pistes évoquées pour le sous-marin touristique

D'autres naufrages de sous-marins pourraient aussi être cités, tels que celui du Ming 361, submersible chinois retrouvé 11 jours après son immersion le 16 avril 2003 dans la mer jaune. 70 personnes y auraient été asphyxiées en raison d'un dysfonctionnement mécanique de moteurs diesel, selon la marine chinoise.

Mais tout espoir n'est pas perdu pour autant. D'abord, car le petit sous-marin touristique ne dispose d'aucune arme militaire, comme en disposaient les navires cités précédemment. Ensuite, car le submersible d'OceanGate est muni d'un «système de surveillance médicale en temps réel», indique le site de l'organisation. Enfin, l'équipage du sous-marin touristique est «composé de quelques explorateurs légendaires, dont certains ont effectué plus de 30 plongées sur le RMS Titanic depuis les années 1980», a écrit dans une publication Hamish Harding, homme d'affaires britannique participant à l'expédition.

Sans avoir étudié l'engin lui-même, Alistair Greig, professeur d'ingénierie marine au University College London, a évoqué auprès de l'AFP deux théories possibles sur la base des images de l'appareil publiées par la presse. Il estime que s'il a eu un problème d'électricité ou de communication, il pourrait être remonté à la surface, flottant «en attendant d'être retrouvé». «Un autre scénario est que la coque a été compromise», et qu'il y ait eu une fuite. «Alors le pronostic n'est pas bon», a-t-il ajouté. Les recherches battent en tout cas leur plein ce lundi soir.

Source: Le Figaro