" Une région qui bouge pas mal ", selon la sismologue Julie Perrot

June 20, 2023
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Un phénomène rare par son intensité. Vendredi, une grande partie ouest de la France a été secouée par un important tremblement de terre. Décrit comme « fort » par les spécialistes, le séisme a été enregistré à une magnitude comprise entre 5,3 et 5,8. Deux répliques d’une magnitude de 5 puis 3,7 ont été ressenties dans la nuit, notamment par les habitants des Deux-Sèvres et de Charente-Maritime. Les secousses n’ont a priori pas fait de blessés mais ont causé d’importants dégâts dans des maisons et des édifices religieux. Des fissures sont apparues et de pierres sont tombées d’environ 5.000 bâtiments, pour une facture comprise entre 150 et 200 millions d’euros.

La secousse a été ressentie de Bordeaux à Saint-Malo. « J’ai eu l’impression qu’on se faisait bombarder la maison », témoigne l’une des habitantes de Laigne, l’un des villages les plus touchés. Surpris par ce phénomène inhabituel, les habitants ont parfois eu très peur. Les spécialistes des séismes sont, eux, beaucoup moins surpris. Julie Perrot fait partie de ceux-là. Enseignante-chercheuse au sein du laboratoire Geo-Ocean à l’université Bretagne occidentale, à Brest, elle savait que la zone touchée pouvait être secouée.

Le séisme survenu vendredi est-il rare par son intensité ?

La magnitude de 5,8 est assez élevée, c’est vrai. C’est assez rare en France métropolitaine. Mais il arrive régulièrement que nous subissions des tremblements de terre de magnitude 3 à 4. C’est souvent le cas en Bretagne. Nous savons qu’il y a un historique important de secousses dans la zone.

Est-ce surprenant que cette partie ouest de la France soit touchée ?

Un décret qui date de 2011 la considère comme en zone sismique 3, c’est-à-dire avec un aléa modéré, donc nous savons que le risque existe. La zone est dans la prolongation de la faille armoricaine, dont les plaques tectoniques se frottent et génèrent ces tremblements de terre réguliers. De la Vendée à l’estuaire de la Gironde, c’est une région qui bouge pas mal.

Pourquoi le séisme a-t-il fait tant de dégâts sur le plan matériel ?

Il a sans doute fait beaucoup de dégâts parce qu’il était superficiel. La profondeur a été enregistrée à moins de 10 km de la surface de la terre, ce qui est très faible. Plus il est en surface, plus les ondes vont se propager car leur amplitude sera plus élevée. Nous sommes en plus dans une région où les sols sont mous. Il y a beaucoup des sédiments, des parties très humides. Cela contribue à propager les ondes. Dans un sol granitique comme dans le Finistère, le même séisme aurait sans doute fait moins de dégâts. Il faut aussi noter que la plupart des bâtiments qui ont été touchés sont plutôt anciens. Ils ne sont pas aux normes parasismiques donc ils résistent moins bien aux tremblements.

Peut-on prédire des répliques ?

Après un séisme, il y aura toujours des répliques. Parfois, on ne les ressent pas, mais elles sont toujours là. Les plaques bougent, elles tremblent donc après une activité tectonique, elles doivent retrouver leur place. Ce que l’on ne sait pas prévoir, c’est quand et où les séismes peuvent se produire.

Peut-on dire que le risque sismique est élevé en France métropolitaine ?

Le risque est considéré comme moyen dans certaines zones, notamment du sud-est de la France. Si le risque est plus élevé, c’est aussi parce que ces zones sont densément peuplées. Un séisme en plein désert, même s’il est très puissant, il ne fera aucun dégât. Ici, nous avons des zones fortement habitées qui présentent un risque plus élevé. Mais je doute fort que l’on puisse avoir un séisme de magnitude 8 comparable à ce que connaît une ville comme Los Angeles par exemple.

Source: 20 Minutes