Le nombre de haies dégringole en France, et c’est un mauvais choix face au changement climatique
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CLIMAT - Dans les villes, les jardins et surtout dans les champs, les haies continuent chaque jour de disparaître à une vitesse impressionnante. Pourtant elles sont très efficaces pour lutter contre la sécheresse, les inondations et la perte de biodiversité dans les campagnes françaises. Pour inverser la tendance, le ministère de l’agriculture veut « construire un pacte en faveur de la haie ». Réel changement ou mesure de façade ?
Depuis 1950, la France a éliminé 70 % de ses haies. Cela représente 1,4 million de kilomètres de végétation détruite, soit l’équivalent de deux allers-retours entre la Terre et la Lune. C’est le résultat des directives d’après guerre et des nombreux remembrements agricoles, périodes au court desquelles les parcelles françaises ont été mises en commun pour former des champs plus grands et gagner en productivité. Les arbustes qui les séparaient ont été arrachés à tour de bras, comme vous pouvez le voir dans la vidéo ci-dessus.
Deux fois plus d’arrachage de haies qu’il y a dix ans
Un déboisement de massif… qui se poursuit aujourd’hui. Selon un rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), depuis 2017 la France perd en moyenne 23 500 km de haies par an. Problème : c’est deux fois plus que ce que l’on arrachait dix ans en arrière. Si bien que le CGAAER estime que « l’état des haies françaises est globalement médiocre » et met en garde le gouvernement sur ses choix agricoles.
Car si la haie était autrefois démodée, elle apparaît aujourd’hui comme une solution face à bon nombre de défis posés par le changement climatique, à commencer par la sécheresse qui préoccupe déjà plusieurs régions en ce mois d’avril. « La haie permet de retenir l’eau et de la faire pénétrer dans les sols, jusqu’aux nappes phréatiques, plutôt que de la laisser ruisseler sur les terrains et provoquer de l’érosion » indique Luc Abbadie, écologue. Plantées perpendiculairement aux pentes, ces rangées de végétation limitent à la fois les risques de crues et de sécheresse.
« Face aux aléas climatiques de plus en plus intenses et fréquents, les haies et les arbres représentent une vraie solution », indique donc le rapport du CGAAER. Car ces enfilades de végétation réduisent aussi les extrêmes de températures et permettent de stocker du CO2, premier gaz à effet de serre responsable du changement climatique. Autre point essentiel : les haies favorisent la biodiversité. Pourquoi alors continuer de les décimer ?
Passée de mode, la haie va-t-elle faire son retour ?
C’est d’abord une question de mentalité : depuis soixante ans le fait d’arracher les haies est présenté aux agriculteurs comme un signe de modernité et de rentabilité pour leurs parcelles. Or cette image tend à changer dans le monde agricole, justement à cause des effets du changement climatique.
« Ces quatre dernières années, les agriculteurs ont dû faire face à des aléas climatiques de plus en plus intenses. Ils sont nombreux à se rendre compte que les haies sont une partie de la solution », constate Sylvie Monier. Difficile en effet de passer à côté de certains constats : « on voit par exemple dans les vignes que les haies sont efficaces pour couper les vents caniculaires du sud, qui viennent brûler les feuillages des cultures ».
« Certes les haies diminuent le rendement car elles occupent de la place sur les parcelles mais comme elles protègent contre les évènements climatiques les plus durs on gagne en sécurité et stabilité des récoltes, c’est un calcul à faire », explique Luc Abbadie, écologue.
by IAISI / Getty Images by IAISI / Getty Images
Pour autant, il n’est pas rentable immédiatement de planter une haie : pour les agriculteurs il faut compter une dizaine d’années pour amortir ce choix. En 2021, le gouvernement lançait en ce sens un programme intitulé « Plantons des haies ». 50 millions d’euros investis pour aider les agriculteurs à planter 7000 km de haies sur la période 2021-2022. « Un soutien utile mais éphémère » constate le CGAAER dans son rapport.
Au regard des 23 500 km de haies perdues chaque année, cet objectif de plantation paraît une goutte d’eau dans l’océan. Le CGAEER souligne que plutôt de planter, il faudrait déjà arrêter d’arracher. « Il devrait y avoir un principe fort aujourd’hui de garder ce qui est en place », estime Luc Abbadie, écologue. Depuis 2015, la PAC a interdit l’arrachage de haie. Une règle qui n’est pas respectée sur le territoire français, faute de contrôles et de sensibilisation.
Pourtant, « si nous décidons de protéger aujourd’hui les haies, nous verrons une nette différence dans vingt ans », insiste Sylvie Monier, agronome. Une solution relativement simple mettre en place, mais « la reconquête de la haie dépendra pour beaucoup des moyens que l’État pourra mobiliser pour financer des projets », prévient le rapport du CGAAER.
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Source: Le HuffPost