Exhumation de soldats allemands en Corrèze : ce qu'il faut retenir de cette première journée de fouilles

June 27, 2023
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Les choses s'accélèrent depuis le témoignage d'Edmond Reveil, sur le sort de 46 soldats allemands, exécutés dans un bois à Meymac (Corrèze), en juin 1944. Une première phase de fouilles a été lancée, ce mardi 27 juin, sur le lieu présumé de ce "fait de guerre", où une conférence de presse s'est tenue.

À quoi ressemble la zone de fouille ?

Les fouilles sont menées, depuis ce mardi 27 juin, pour retrouver les dépouilles de quelque 36 personnes, des soldats allemands et une jeune femme proche de la Gestapo, tués en juin 1944 par la Résistance en Corrèze. L'endroit qui se situe sur les hauteurs de Meymac, en Corrèze, ne ressemble plus à ce qu’il était en juin 1944. De part et d’autre d'un chemin, de hauts douglas ont remplacé le paysage de landes, juste derrière une bute.

En se basant sur les écrits historiques, les témoignages et les rapports d’une précédente exhumation, ayant eu lieu entre 1967 et 1969, les équipes allemandes du Volksbund (VDK) sont parvenues à délimiter une zone de recherches, longue de 200 mètres, sur 50 mètres de large.

"Les géoradars dont nous disposons permettent de quadriller le secteur et sonder le sol sur une profondeur de 8 mètres. On essaye de replonger dans le contexte de l’époque, pour faire ces recherches. D’expérience, les fosses ne sont pas très profondes, ni très loin des chemins. La zone des recherches est plus large que la fosse supposée", a expliqué, sur site, Arne Schrader, directeur du VDK.

Le géoradar a commencé à chercher les corps des soldats allemands fusillés par la Résistance en Corrèze en 1944

Quel est l'objectif de ces fouilles ?

L’objectif de cette première phase est de mettre en évidence l’endroit précis de cette fosse clandestine, creusée par les soldats allemands eux-mêmes quelques minutes avant leur mort en juin 1944. Les résultats de cette première étape devraient être connus d’ici trois semaines. Ce n’est qu’ensuite, que sera décidé de procéder à l’exhumation, ou non. "Il faut être prudent quant au succès de cette nouvelle opération. Nous n’avons pas toutes les pièces du puzzle", a rappelé le préfet de Corrèze, lors d’une conférence de presse organisée à la mairie de Meymac.

Des recherches lancées grâce à deux témoins

Ces secondes fouilles réalisées dans ce bois de Meymac (plus de 53 ans après la première tentative), font suite à la prise de parole d’Edmond Réveil, ancien résistant aujourd’hui âgé de 98 ans, lors d’une réunion d’anciens combattants, en 2019. Celui qui répondait au nom de "Papillon" quand il était agent de liaison chez les FTP, avait alors rappelé l’histoire de ces soldats allemands exécutés dans un bois, le 12 juin 1944, après l’attaque de Tulle.

L’affaire avait ensuite été transférée à l’Onacvg (Office national des anciens combattants et des victimes de guerre). Puis, un deuxième témoin, André Nirelli, qui avait fait l’école buissonnière dans les années 1960 pour assister à la première exhumation, avait permis de retrouver le lieu précis. Durant la pandémie de Covid, les investigations avaient été interrompues.

"En février dernier, la sous-préfète d’Ussel s’est rendue sur les lieux en question avec l’Onacvg, la mairie, Edmond Réveil et le témoin. Edmond Réveil n’avait pas en tête l’endroit exact, le lieu ayant beaucoup changé. Par contre, le témoin avait un souvenir plus précis. Nous sommes alors revenus vers le VDK, qui s’est déplacé en mars en Corrèze, pour voir si des recherches étaient envisageables", a relaté Etienne Desplanques, préfet de la Corrèze. Fin mai, Edmond Réveil témoignait dans La Montagne.

Des zones d'ombres encore nombreuses

Si le VDK est habitué à ce type de recherches de corps de soldats oubliés, en sortant entre 10.000 et 20.000 dépouilles tous les ans, les zones d’ombre restent, malgré tout, nombreuses dans ce dossier. En plus des incertitudes concernant la date de la première exhumation, des questions sur l’identité des Allemands exécutés en juin 1944, demeurent en partie sans réponse. L’opération, même si elle aboutit, apportera avec elle, sans nul doute, son lot de mystères. Dans son rapport de 1969, le VDK mentionne, par exemple, que seulement sept des onze soldats ont pu être identifiés. Trois d’entre eux avaient leur plaque militaire illisible, un quatrième portait celle d’un soldat encore en vie après la guerre.

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Autre question qui reste pour le moment en suspens : même s’ils sont repérés grâce au géoradar, les corps des soldats et de cette femme pourront-ils être sortis de terre?? En effet, le remplacement des landes par des bois pourrait avoir pour effet de piéger les dépouilles dans le sol meymacois. "Dans ce cas, nous serions dans le cas d’une 'nécropole de fait'. Pour qu’un recueillement puisse avoir lieu, une stèle pourrait être érigée", nous explique un représentant de l’Onacvg.

Des mesures de sécurité ont été prises

Des mesures de sécurité ont été prises par la mairie pour sécuriser la zone de recherches, et la préserver des "personnes mal intentionnées". L’accès et le stationnement sur site ont été interdits, ainsi que le transport de matériel de détection de métaux dans le sol.

Vidéos, reportages, entretiens : notre dossier complet sur cette affaire

Pierre Vignaud

Vidéo : Philippe Robert

Source: La Montagne