L’artificialisation des sols, ce danger pour la nature qu’une loi promet de réduire d’ici 2031

June 28, 2023
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Monty Rakusen / Getty Images Monty Rakusen / Getty Images

ENVIRONNEMENT - Zéro Artificialisation Nette. Voilà ce que promet la proposition de loi dite ZAN qui a été discutée à l’Assemblée Nationale et qui doit être adoptée ce mardi 27 juin en fin de journée. Ce texte ambitionne de réduire de 50 % l’artificialisation des sols d’ici 2031 pour atteindre l’objectif du zéro artificialisation nette en 2050. Mais derrière cette promesse, deux termes sont à clarifier : « artificialisation » et « nette ».

Le code de l’urbanisme définit l’artificialisation comme « l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage ». Concrètement, l’artificialisation appauvrit les sols et porte préjudice à différentes échelles.

35 000 terrains de foot artificialisés chaque année

En France, entre 20 000 et 30 000 hectares sont artificialisés chaque année, ce qui représente en moyenne 35 000 terrains de football. Ce phénomène est surtout lié à l’urbanisation, l’étalement des villes nécessitant de nouvelles constructions, aussi bien des habitations que des espaces publics.

Quant au N de ZAN, qui signifie « nette », il fait toute la différence. « L’objectif, ce n’est pas zéro artificialisation d’ici 2050, c’est déjà de la réduire de moitié d’ici 2031, pointe Tanguy Borgarelli, responsable de projets Nature en Ville à la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO). Mais surtout, ce “nette” induit qu’on ne va pas vers une artificialisation zéro, mais plutôt qu’on cherche à compenser l’impact environnemental causé par la transformation des sols. »

Car les conséquences de l’artificialisation sont nombreuses. À commencer par les répercussions environnementales. « Raser un espace naturel pour y construire une infrastructure implique forcément la destruction de milieux de vie et de sources d’alimentation de certaines espèces, explique Agnès Hallosserie, directrice du Programme Biodiversité de l’Institut du Développement Durable et des Relations Internationales (IDDRI). Ces espèces ne sont pas toujours capables de s’adapter et risquent de disparaître à leur tour ».

Des conséquences environnementales… et sociales

De plus, artificialisation rime avec imperméabilisation. Les sols transformés ne sont plus capables d’absorber l’eau de pluie, ce qui peut provoquer des inondations en cas de précipitations abondantes en peu de temps. Il en est de même pour la captation du CO2. Dans un contexte d’élévation global des émissions de gaz effet de serre responsables du réchauffement climatique, le sol est censé être notre premier allié grâce à sa grande capacité d’absorption de carbone, notamment par les arbres. Mais une fois bétonné, du moins artificialisé, il perd tout de ses vertus.

Agnès Hallosserie souligne que l’artificialisation a aussi des répercussions sociales. En plus de diminuer le nombre de terres cultivables et donc de réduire l’autonomie alimentaire du pays, l’artificialisation renforce la fracture territoriale. « Certains foyers se retrouvent loin des centres-villes et, sans avoir la possibilité financière de se déplacer, finissent par s’isoler, ce qui a aussi un impact sur la santé mentale », déplore-t-elle.

Si la loi ZAN est une bonne initiative pour limiter cette artificialisation, « le Sénat a apporté des dérogations qui la dénaturent et qui lui font perdre de sa radicalité et efficacité » accuse Tanguy Borgarelli. Mais surtout, pour espérer une amélioration sur le long terme, « la compensation ne suffira pas », affirme Agnès Hallosserie. « Il faudrait repenser entièrement notre vision de ce qu’est “un bon cadre de vie”, pour se tourner vers des techniques d’urbanisation plus durables ».

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Source: Le HuffPost