Tensions internes au Théâtre national de Nice: des salariés balancent, la direction se défend

July 04, 2023
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En trois ans, il y a eu seize départs volontaires. C’est énorme pour une structure telle que le TNN [Théâtre national de Nice]. C’est symptomatique du climat délétère qui y règne. » Jonathan Gensburger fait partie de ceux qui ont quitté le navire. Comédien niçois, il avait intégré la troupe à l’arrivée de Muriel Mayette-Holtz à la direction de ce centre dramatique national, il y a trois ans. Ses révélations n’étonnent guère, la rumeur enflait depuis plusieurs mois mais personne n’avait, jusqu’alors, accepté de parler.

"Je n’ai pas envie de me taire plus longtemps. J’ai essayé de discuter avec la direction du TNN pendant des mois. En vain. Je ne me voyais pas signer pour une quatrième saison. Ça me fait mal au cœur car je suis niçois, j’aime ma ville, j’aime le théâtre public… Mais ce management-là, je n’en veux plus." Même sentiment chez Frédéric de Goldfiem, lui aussi comédien, lui aussi sur le départ. "Je n’ai rien à dire sur le plan artistique. De ce point de vue, nous sommes tous d’accord. En revanche, le reste, la gestion, ça ne me convient pas. Il y a trois ans, à la création de la troupe et l’arrivée de la nouvelle direction, un climat pesant s’est installé. Pas seulement parmi les comédiens. Tous les corps de métiers sont concernés."

Plusieurs autres personnes ont accepté de nous livrer leur sentiment sur le sujet, à une condition sine que non: "Ne mettez surtout ni mon nom, ni ma profession, ni aucun élément qui puisse m’identifier. Je ne veux pas de représailles. Et puis, c’est un petit milieu…".

"Environnement toxique"

"Malaise", "souffrance au travail", ces expressions reviennent à plusieurs reprises. Les discours se ressemblent. "C’est une accumulation de choses insidieuses, explique l’un des témoins, à l’instar de tous les autres. Au début, vous avez l’impression que quelque chose cloche, sans trop savoir quoi. Et puis au fil du temps, vous vous rendez compte qu’il y a un énorme problème de communication, des remarques inappropriées suivies de phrases du style: ‘‘Oh ça va, c’est une blague’’. Je l’avoue, quelque part, ça m’a renvoyé à ma propre lâcheté: j’ai préféré me taire plutôt que de risquer d’être la cible de ces réflexions. C’est un environnement toxique."

Jonathan Gensburger et Frédéric de Goldfiem retiennent certains faits marquants, révélateurs du problème. "D’abord, la censure. La direction déteste ce mot. Et pourtant, combien de fois on nous a dit de ne surtout pas parler de la démolition de l’ancien bâtiment du TNN! Pourtant, ça a été un traumatisme. La communication a été très mauvaise. Ça rejoint la trop grande proximité avec les politiques locaux."

Un événement a mis le feu aux poudres, début juin. Jonathan Gensburger et Frédéric de Goldfiem racontent: "Nous avons écrit Caricatures miniatures, présenté au public début juin. Dedans, nous avons glissé quelques piques dans un esprit bouffon. Et nous avons appris de manière totalement fortuite que la direction avait demandé à un média local de ne pas assister à la représentation (mais le journaliste est quand même venu)! Pour nous, cela montre que la direction ne soutenait pas le projet, ne voulait pas qu’on en parle. Maintenant, c’est fini, nous ne voulons plus nous taire."

Source: Nice matin