Manifestation du 1er-Mai : Une mobilisation " historique ", mais vraiment décisive contre la réforme des retraites ?
C’est une journée très attendue par les opposants à la réforme des retraites. L’intersyndicale a appelé à faire du 1er-Mai, ce lundi, « une journée de mobilisation exceptionnelle et populaire ». Après la validation du texte gouvernemental par le Conseil constitutionnel, mi-avril, les responsables syndicaux avaient ciblé ce lundi férié, journée internationale des travailleurs. L’objectif : relancer le mouvement et maintenir la pression sur l’exécutif pour demander le retrait du texte. Mais les manifestations seront-elles pour autant décisives dans cette bataille politico-sociale ?
Un 1er-Mai déjà « historique » pour les renseignements
« La mobilisation du 1er-Mai sera inédite et exceptionnelle », a déjà annoncé Sophie Binet, la nouvelle patronne de la CGT, jeudi matin sur RTL. Deux semaines après la promulgation du projet de loi par Emmanuel Macron, les manifestations sporadiques contre les déplacements de ministres et autres casserolades montrent que la colère reste importante dans le pays. Un nouveau sondage de l’Ifop, publié vendredi, confirme que le niveau de soutien ou de sympathie au mouvement reste aussi élevé que début avril (60 %), et enregistre une hausse de 9 points par rapport à janvier.
« On sent que la contestation reste bien ancrée dans le pays, et on peut imaginer que ce 1er-Mai sera une réussite pour les syndicats », assure Stéphane Sirot, historien spécialiste du syndicalisme et des mouvements sociaux. L’année dernière, la fête des travailleurs n’avait rassemblé que 210.000 manifestants, selon la CGT, et 116.500, dixit l’Intérieur, dans l’ensemble du pays. « Les 1er-Mai sont des journées symboliques, mais elles n’ont pas rassemblé massivement ces dernières années, sauf quand elles s’inscrivent dans un mouvement social comme aujourd’hui. L’intersyndicale sera de nouveau soudée pour cette journée du 1er-Mai, c’est très rare, et c’est ce qui a fait sa force ces derniers mois », ajoute-t-il.
Selon une note des renseignements révélée par Europe 1, entre 80.000 et 100.000 personnes seraient attendues rien qu’à Paris. « Il est d’ores et déjà approprié de qualifier ce 1er-Mai d’historique au regard de la mobilisation », indiquent les services. « Ça va être énorme », s’est d’ailleurs enthousiasmé cette semaine Jean-Luc Mélenchon sur sa chaîne YouTube, alors que tous les partis de gauche ont appelé à battre le pavé. « Faites ce qu’il faut pour que ce soit énorme ! La lutte continue et le président devra retirer sa loi, et sans doute le gouvernement qui va avec », a aussi lancé le leader insoumis.
Le 3 mai dans toutes les têtes
Mais aussi importante soit-elle, la mobilisation de lundi aura-t-elle vraiment un impact politique ? Malgré douze journées de grèves et de manifestations historiques, Emmanuel Macron n’a pas bronché. Et Elisabeth Borne n’a même pas évoqué la réforme des retraites ou la contestation sociale au moment de dresser sa feuille de route des « cent jours », mercredi dernier. « La contestation est importante, mais c’est l’affaire de quelques jours, raille un cadre de Renaissance. Tout va dépendre de ce que dira le Conseil constitutionnel ».
Dans l’exécutif comme dans l’opposition, tous ont en effet les yeux rivés vers le 3 mai. Ce jour-là, les Sages annonceront leur décision de valider ou non le second Référendum d’initiative partagé (RIP). « Cela peut créer un nouveau contexte », assure Stéphane Sirot. « Une validation du RIP redynamiserait la contestation et ancrerait cette question des retraites sur plusieurs mois ; les syndicats maintiendraient sans doute leur démarche unitaire pour récolter les signatures ». En cas d’invalidation du RIP, l’exécutif espère au contraire tourner définitivement la page.
Comme pour mieux enjamber cette ultime étape, la Première ministre a d’ailleurs déjà invité les syndicats à sa table pour renouer le dialogue en milieu de semaine prochaine. « La stratégie syndicale a été de coller au calendrier institutionnel, donc assez logiquement, si celui-ci s’achève en cas d’échec du RIP, on peut imaginer qu’il n’y ait plus de grandes journées d’action et que des sensibilités différentes s’expriment sur le retour au dialogue », ajoute le spécialiste. La CFDT a déjà indiqué qu’elle serait prête à discuter des prochains textes de loi, sur la question du travail notamment. Suffisant pour se tourner vers la suite du quinquennat ? Erwan Balanant, député MoDem du Finistère, reste prudent. « Derrière cette colère des Français sur les 64 ans, on ressent beaucoup d’inquiétudes. Tout ne sera pas purgé, le croire serait une erreur. Il faudra continuer d’aller au contact, apaiser et travailler ».
Source: 20 Minutes