"C'est vraiment les mêmes modes opératoires" : avant la grève au "JDD", quels précédents pour les prises de contrôle de médias par Vincent Bolloré

July 09, 2023
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Même s'il s'en défend, l'ombre de Vincent Bolloré plane au-dessus de la nomination de Geoffroy Lejeune à la tête du "Journal du Dimanche". Le milliardaire breton se construit, depuis une dizaine d'années, un empire médiatique, en reproduisant les mêmes schémas "de rédaction en rédaction."

La grève entamée par les salariés du JDD depuis le 22 juin a été reconduite vendredi à 95% et empêche donc la parution du journal, dimanche 9 juillet, pour la troisième semaine consécutive. La rédaction s'oppose toujours à la nomination, à sa tête, de l'ancien directeur de l'hebdomadaire Valeurs actuelles, Geoffroy Lejeune, marqué à l'extrême droite. Une nomination qui - pour beaucoup - a été décidée par Vincent Bolloré. Alors que la Commission européenne a donné son feu vert au rachat du groupe Lagardère, auquel appartient le Journal du dimanche (JDD), par Vivendi, le milliardaire breton a déjà fait plier de nombreuses rédactions avec une méthode similaire.

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Au départ, il y a toujours une annonce vécue au sein de la rédaction comme une provocation. Au JDD, c'est donc la nomination de Geoffroy Lejeune. Il y a sept ans, l'arrivée de Jean-Marc Morandini à i-Télé avait provoqué une grève d'un mois. Les anciens d'Europe 1 estiment de leur côté que la prise de contrôle avait été plus "sournoise", moins "violente". "À Europe 1, nous n'avons pas eu d'annonce aussi forte que celle que rencontrent aujourd'hui nos collègues du JDD, souligne Olivier Samain, ancien journaliste d'Europe 1, délégué syndical SNJ. On n'a pas eu la nomination d'un directeur comme Geoffroy Lejeune mais on a très vite compris, avec les annonces qui nous sont tombées dessus dès le printemps 2021, qu'à brève échéance, l'antenne d'Europe 1 allait perdre une grande partie de son âme et s'imprégner fortement des contenus et des pratiques de la chaîne CNews."

Grèves, pétitions... puis départs

Face à ces changements qui modifient l'identité de ces différents médias, la suite, ce sont donc les grèves, les motions de défiance, les pétitions, puis les départs. Les rédactions d'Europe 1, i-Télé, Canal+ ou Paris Match ont été décimées. Les journalistes qui restent sont ceux qui acceptent d'être loyaux à Vincent Bolloré, dit un ancien de Canal+. "Pour moi, c'est évident que Vincent Bolloré est derrière toutes les toutes les décisions", assure Isabelle Roberts, cofondatrice des Jours.fr. Cette journaliste décortique l'emprise du milliardaire sur les médias français. "Je travaille sur Vincent Bolloré depuis sept ans."

"Aux Jours.fr, on dit souvent que Vincent Bolloré est un serial killer de rédactions et c'est vraiment ça." Isabelle Roberts, journaliste et cofondatrice des Jours.fr à franceinfo

"C'est vraiment les mêmes modes opératoires de rédaction en rédaction", reprend Isabelle Roberts. De son côté, Vincent Bolloré explique qu'il n'a pas le pouvoir de nommer qui que ce soit. D'ailleurs, concernant le Journal du Dimanche, Europe 1 et Paris Match, normalement, il n'en a pas le droit car ces médias appartiennent toujours au groupe Lagardère. Il y a actuellement une enquête de la Commission européenne pour savoir si oui ou non Vincent Bolloré a pris le contrôle de tous ses médias avant d'y être autorisé.

Source: franceinfo