Irrégularités, infractions au code de l’urbanisme... Nouvelles bisbilles judiciaires autour de l’ex-Vista Palace de Roquebrune-Cap-Martin

July 10, 2023
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Le Vista Palace est devenu le Maybourne Riviera depuis que des Qataris l’ont racheté. La transformation de cet hôtel vieillissant de Roquebrune-Cap-Martin en palace ultramoderne aura coûté la bagatelle de 300 millions d’euros. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le cheik Hamad ben Jassem ben Jaber Al Thani n’a pas lésiné sur les moyens. "Nous, on voulait juste faire quelque chose de beau", plaide un de ses gestionnaires de patrimoine tout en requérant l’anonymat. Cet ancien Premier ministre du Qatar, cousin direct de l’émir, n’aime pas la publicité. Raté! Depuis que son fonds d’investissement personnel a jeté son dévolu sur le Vista-Palace en 2014, l’hôtel n’en finit plus d’alimenter la chronique judiciaire.

Ce sont d’abord les autres candidats au rachat qui s’étaient émus de voir l’offre des Qataris acceptée par le tribunal de commerce de Nice alors qu’elle était "hors délais" selon eux. Mais la plainte déposée auprès du parquet national financier est restée lettre morte. Tout comme la plupart des procédures intentées par une riveraine déterminée, Annie Durante, qui n’a eu de cesse de dénoncer ce qu’elle considère comme de graves entorses aux règles d’urbanisme. Sa dernière requête devant le tribunal administratif attendrait depuis deux ans d’être enfin audiencée. Qu’à cela tienne, c’est une ancienne conseillère municipale roquebrunoise qui a finalement saisi la justice pénale en août dernier, comme Nice-Matin le révélait, à la veille du coup d’envoi de la coupe du monde au Qatar.

Enquête préliminaire

Cette fois, le parquet de Nice confirme avoir "ouvert une enquête préliminaire". C’est lui qui a finalement ordonné à la préfecture de procéder à un contrôle d’urbanisme. En novembre dernier, soit plus d’un an après l’inauguration en grande pompe du Maybourne Riviera, les services de l’État y ont bien relevé un certain nombre de "non-conformités". "Des problèmes de surface et d’ouvertures", avance une source proche du dossier. Rien d’irrémédiable pour autant, assure-t-on du côté du cheik Hamad: "Nous travaillons en parfaite collaboration avec la préfecture et tout devrait être réglé d’ici quelques semaines."

Le propriétaire qatari espère pouvoir échapper aux foudres de la justice niçoise en déposant un "permis balais". Ses opposants lui reprochaient déjà d’avoir, a posteriori en 2020, effacé de précédentes irrégularités présumées au gré d’une simple demande préalable de travaux... accordée illico presto par la mairie de Roquebrune-Cap-Martin (1). En dépit du caractère assez pharaonique du chantier engagé. Car pour transformer l’ex-Vista en palais troglodyte, il a d’abord fallu conforter le piton rocheux sur lequel l’hôtel est posé. Au moyen de 58 tirants de 40 tonnes de bétons plantés dans la falaise. "En pleine zone rouge et sur un site Natura 2000", s’offusquent les riverains.

Guerre intestine entre associés

Mais en référé, la justice administrative n’a rien trouvé à y redire. De quoi conforter la position du cheik Hamad ben Jassem ben Jaber Al Thani. Son entourage joue sur du velours en soulignant que la plupart de ces "oppositions" ont été déboutées devant les tribunaux. Et pourtant, le lointain propriétaire qatarien confie aujourd’hui avoir eu quelques "surprises" en reprenant possession du palace, une fois sa mue achevée. Il n’hésite pas à pointer du doigt son ancien partenaire d’affaires, un promoteur irlandais à qui il avait "confié la maîtrise d’ouvrage déléguée" de ce vaste chantier. Il faut dire que le divorce entre celui-ci, Paddy McKillen, et le cheik Hamad est bel et bien consommé... Même s’il reste à en arrêter les termes financiers.

Cette fois c’est la Haute cour de Londres qui a été saisie pour trancher le différend qui porte sur des centaines de millions de livres sterling. Dans Libération ce dimanche, Paddy McKillen, annonçait qu’il était prêt à consacrer jusqu’à son "dernier penny" dans cette autre procédure. Même si la fortune du promoteur irlandais est sans commune mesure avec celle du cousin de l’émir du Qatar, le rapport est cette fois un peu plus équilibré. Dans cette affaire, les oppositions locales ont toujours eu le sentiment d’être "le pot de terre contre le pot de fer".

1- Contacté, Patric Cesari, le maire de Roquebrune-Cap-Martin, n’a pas souhaité donner suite à nos demandes.

Source: Nice matin