"Mission : Impossible - Dead Reckoning" : Tom Cruise, la star qui court pour défier le temps qui passe

July 12, 2023
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L'acteur américain incarne pour la septième fois l'agent Ethan Hunt dans "Mission : Impossible - Dead Reckoning partie 1", qui sort mercredi au cinéma. La star sexagénaire enchaîne les cascades et fait montre de son art de la course à pied, devenu sa signature à l'écran.

Il court, il court, le Tom Cruise. A 61 ans, l'acteur américain s'apprête encore à piquer de nombreux sprints dans Mission : Impossible - Dead Reckoning partie 1, le septième volet de la saga des aventures d'Ethan Hunt, qui sort mercredi 12 juillet dans les salles françaises. S'il va encore devoir lutter contre des terroristes voulant anéantir le monde, Tom Cruise va le faire en courant.

C'est devenu la marque de fabrique de la star, un gimmick qui revient film après film. Paramount Pictures, le distributeur, en a bien conscience et s'est amusé à compiler les moments où Tom Cruise court dans les différents volets de la franchise Mission : Impossible. Résultat : 10 minutes de sprints de l'acteur. En costume, en smoking, en jean et tee-shirt, cheveux au vent ou ras...

Comme l'a dit un jour son ami Ben Stiller au site américain Edge Media Network, "la façon dont Tom [Cruise] court a une énorme influence sur le monde. Regardons les choses en face. Culturellement, tout le monde veut courir comme Tom Cruise". Aujourd'hui, il est devenu "l'acteur-coureur aux yeux du public", synthétise Pierre-Jean Vazel, entraîneur d'athlétisme au club Athlétisme Metz Métropole, joint par franceinfo. Le public qui se déplace en salle "s'y attend", confirme à franceinfo Maureen Lepers, docteure en cinéma et audiovisuel et enseignante à l'université Sorbonne Nouvelle.

Une technique digne des héros de l'Antiquité

Tom Cruise "court dans des films depuis 1981", comme le précise avec humour sa courte biographie sur son compte Instagram. Mais sa manière de courir a évolué avec le temps. Ses paumes ont longtemps été fermées, avant de s'ouvrir au début des années 2000. "Carl Lewis changeait la position de ses paumes en fonction de la course, mais le fait que Tom Cruise les ouvre prolonge les mouvements, cela donne plus d'expressivité au corps et renforce l'impression de vitesse", éclaire Pierre-Jean Vazel. Le changement intervient au moment du tournage de Collateral, de Michael Mann, sorti en France en 2004, d'après Caryl Smith Gilbert, entraîneur d'athlétisme aux Etats-Unis, citée par ESPN : "Sa technique s'est améliorée et je me suis dit : 'Il doit être vraiment coaché.' Je pense qu'il doit aussi le faire pendant son temps libre, il essaie de s'améliorer."

Bras bien écartés, paumes ouvertes, genoux qui remontent haut, buste droit, légèrement en arrière... Sa technique de course est spectaculaire. "Elle est archétypale. On retrouve les mêmes angulations que lors de l'époque archaïque grecque", poursuit Pierre-Jean Vazel. Mais, à force de courir après un certain esthétisme à l'écran, "il a perdu de son naturel, son geste est devenu plus appris, il se regarde presque courir, estime l'entraîneur français. Il court comme s'il voulait nous l'enseigner".

Même si son petit gabarit – il mesure 1,70 mètre – peut aussi accentuer l'impression de vitesse, en raison de la fréquence gestuelle, Tom Cruise n'aurait pas eu à rougir de ses performances au 100 mètres. Un internaute du forum informatique Quora s'est amusé à calculer son temps en prenant comme référence une course dans Mission : Impossible III. Selon ses calculs, l'acteur aurait parcouru la distance reine en environ 15 secondes. Pour rappel, le record du monde, détenu par Usain Bolt, est de 9"58.

Une manière de construire son propre mythe

Le public est habitué aux acrobaties de l'acteur. Pourtant, au début de sa carrière, sa propension à réaliser des cascades de plus en plus folles n'était pas si prononcée dans sa filmographie. "Il alternait du cinéma d'auteur, chez Stanley Kubrick, Martin Scorsese ou Paul Thomas Anderson, et des films d'action, mais la partie 'auteur' a quasiment disparu", observe Maureen Lepers. Désormais, on trouve aux manettes des films dont il est à l'affiche Christopher McQuarrie, réalisateur des derniers épisodes de Mission : Impossible ou Doug Liman (Barry Seal, Edge of Tomorrow). Des cinéastes spécialisés dans l'action au service de la star, "quasiment des peintres d'apparat" pour l'acteur, selon l'enseignante.

Son corps a cependant toujours été son principal outil de travail. "Dans la fameuse scène de danse de Risky Business, ce sont ses jambes que l'on voit", rappelle l'universitaire, citant l'un des premiers films à avoir révélé Tom Cruise, en 1983. Plutôt adepte d'une méthode précise, "à l'économie", selon elle, son jeu d'acteur passe aussi par ce physique en mouvement. A la poursuite de quelque chose, comme dans les Mission : Impossible, ou fuyant, comme dans Minority Report, "il sprinte", soutient Pierre-Jean Vazel, et "cela lui donne sa dimension dramatique".

Sprinter pour sauver le cinéma hollywoodien

Saut en parachute, à moto, escalade, agrippé à un avion en vol, pilote de chasse, bientôt dans l'espace... Son corps n'a pas arrêté de bouger, en dépit du temps qui passe. "Cela demande une rigueur très poussée, c'est impressionnant, relève Pierre-Jean Vazel. Il a conservé son explosivité alors que normalement, à cet âge, on perd la puissance car les muscles répondent moins bien."

Un corps par lequel il entend prouver que le temps n'a aucune prise sur lui, à l'image du héros qu'il incarne, Ethan Hunt, fringant comme au premier jour, après sept films en presque trois décennies. "Tom Cruise a très bien compris qu'une façon de faire durer sa carrière est de capitaliser sur ce côté 'homme-machine' qui ne mourra jamais, note Maureen Lepers. Il n'est rien d'autre qu'un corps en mouvement perpétuel qui résiste à l'immobilité."

Courir est aussi une manière pour lui de s'inscrire un peu plus dans la légende de Hollywood. "La course est un geste très associé à l'acteur, un geste de cinéma assez fort, car métaphoriquement, tous les films d'action hollywoodiens sont des courses, où il faut aller d'un point A à un point B", analyse Maureen Lepers. "Le cinéma hollywoodien a créé des 'femmes-objets', les hommes, eux, sont filmés en mouvement, ils ne sont capables que de sauver le monde et d'être sexy en le faisant", rappelle l'universitaire.

"Chez Tom Cruise, toute son image d'acteur est construite sur le fait qu'il ne peut pas mourir, qu'il est irremplaçable." Maureen Lepers, enseignante à l'université Sorbonne Nouvelle à franceinfo

Un héros dans la fiction, mais aussi dans la réalité ? "Cela fait partie d'un mythe né après la pandémie qui pose Tom Cruise en sauveur du cinéma hollywoodien", développe la spécialiste. Steven Spielberg l'a d'ailleurs qualifié de la sorte lors d'un dîner de gala en février, après le carton au box-office de Top Gun : Maverick, qui a ramené le public vers les salles obscures après la crise du Covid-19. Un statut qui tend à le piéger dans une mission impossible. "Je ne suis pas sûre qu'il puisse se laisser vieillir", souligne l'experte, qui se base sur les récents films de l'acteur. Dans Top Gun : Maverick (2022), suite du film culte, trente-sept ans après, si la relève est là, c'est toujours lui qui sauve le monde. Et dans Mission : Impossible - Fallout (2018), il fait face à Henry Cavill, l'acteur qui a incarné Superman sur le grand écran. Qui gagne ? On vous laisse deviner.

Source: franceinfo