Cinq policiers de la " CSI 93 " renvoyés devant une cour criminelle pour " violences aggravées " et " faux "
Pour l’avocat de la partie civile, Me Yassine Bouzrou, c’est « rarissime, voire inédit » : cinq policiers de la compagnie de sécurisation et d’intervention de Seine-Saint-Denis (CSI 93) font l’objet d’un renvoi par un juge d’instruction devant la cour criminelle départementale, comme l’a révélé Mediapart, mercredi 12 juillet, pour « violences aggravées » commises « en réunion » et « avec armes », mais surtout pour « faux en écriture publique », donc pour avoir menti, dans leurs procès-verbaux, afin de couvrir leurs exactions.
Les membres de cette unité – déjà plusieurs fois mise en cause pour ses dérives – sont soupçonnés d’avoir, en août 2019, violemment passé à tabac un dealer, frappé au visage à coups de pied, étranglé et criblé de décharges de pistolet à impulsions électriques (Taser) alors qu’il était déjà menotté et maîtrisé. Surtout, ils sont soupçonnés d’avoir ensuite rédigé des procès-verbaux (PV) d’interpellation mensongers afin de se couvrir.
L’ordonnance de renvoi de la juge d’instruction Claire Thépaut, datée du 17 février, que Le Monde a pu consulter, fait le récit détaillé des violences subies par Thierry L., établi notamment grâce à la vidéosurveillance, qui va largement démentir la version des policiers.
« Ils m’ont étranglé »
Selon ces derniers, Kevin C., gardien de la paix, qui dit arborer son brassard « police » au bras, effectue une patrouille à pied dans la cité Emile-Cordon de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), le 9 août 2019, lorsqu’il est témoin d’une transaction entre le dealer et un client. Le policier appelle ses collègues en renfort. Prévenu par des guetteurs, Thierry L. prend la fuite. Il est rattrapé, mais se montre très agité, obligeant les policiers à user du taser pour le maîtriser.
La version du policier est corroborée par ses collègues, Jean-Baptiste D., Loïc P. , Sami B. N. et Geoffrey R. Dans leur rapport, ils mentionnent avoir dû porter quelques coups « légers » à Thierry L. pour le maîtriser et reconnaissent l’utilisation d’un pistolet à impulsions électriques alors qu’il tentait de mordre l’un d’eux. Kevin C. porte d’ailleurs plainte contre le dealer.
Thierry L. fait pourtant un tout autre récit. L’homme alors âgé de 22 ans assure que Kevin C., qui ne portait pas son brassard « police », s’est en réalité fait passer pour un client, avant de l’asperger de gaz lacrymogène, puis de le frapper à plusieurs reprises alors qu’il était au sol. Il assure également que les policiers lui ont dérobé les 180 euros qu’il avait gagnés en vendant du cannabis ce jour-là. Toujours selon son récit, les violences se sont poursuivies une fois à bord du camion de police, où les policiers l’auraient allongé au sol, leurs pieds sur sa tête : « Ils m’ont donné des coups de pied sur la tête, ils m’ont donné des coups de taser sur les parties génitales, (…) là où j’ai vraiment eu peur, c’est quand ils m’ont étranglé, je me suis vraiment vu mourir. »
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Source: Le Monde