Le tribun Narendra Modi enflamme son auditoire à Paris

July 14, 2023
299 views

Le premier ministre indien, Narendra Modi, à La Seine musicale, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), le 13 juillet 2023. BERTRAND GUAY / AFP

Un accueil de rockstar pour une arrivée tout en douceur : depuis un moment, en cette soirée du jeudi 13 juillet, la foule des fans scandait « Modi ! Modi ! » dans le grand auditorium de La Seine musicale à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine). Chauffé à blanc, le public était conquis d’avance quand le premier ministre indien est entré sur scène à pas mesurés, mains jointes dans le namasté de rigueur. Extase de la foule en transe, près de 4 000 Indiens de la diaspora brandissant les drapeaux de l’Inde, scandant les premiers vers de l’hymne national Vande Mataram (« louée soit la patrie ») ou hurlant à pleins poumons l’injonction martiale « Bharat Mata Ki Jai » (Inde victorieuse).

On sent Narendra Modi jubiler devant ses adorateurs-concitoyens venus en masse, non seulement de France mais aussi d’Europe pour assister au discours du premier ministre indien, invité d’honneur le lendemain au défilé du 14-Juillet. Quand il cajole son auditoire, on devine aussi la satisfaction de celui qui sait à la perfection comment bénéficier par ricochet de ses compliments : « L’enthousiasme que vous démontrez aujourd’hui est sans précédent, commence-t-il, mains tendues vers le public. J’ai l’impression d’être encore en Inde. Mais, qui, je vous le demande, rend cet événement extraordinaire, oui, qui ? » Réponse de l’assistance « Modi ! Modi ». Réplique de l’adulé à ses adulateurs : « Non, vous vous trompez, ce n’est pas Modi, c’est vous tous ! »

Narendra Modi, premier ministre depuis 2014, est un tribun populiste, un nationaliste qui enflamme les foules en exaltant la fibre nationaliste des hindous (79 % de la population). Il sait jouer sur les cordes ultrasensibles d’un pays à l’histoire convulsive, marquée par une cohabitation complexe avec les dynasties musulmanes qui l’ont jadis subjugué et par la colonisation britannique qui l’a naguère asservi.

Désormais, martèle le premier ministre, le temps de l’Inde est venu. Un temps qui voit cette « Bharat Mata » émergente (la « mère Inde ») permettre à ses enfants de « réaliser tous leurs rêves » ; cette Inde devenue désormais si essentielle à la marche du monde qu’elle contribue « à emmener [la planète tout entière] vers l’avant ». Quant à lui, Narendra Modi, qui ne perd jamais de vue l’échéance des élections de 2024, il assure son peuple que « chaque goutte de [son] sang n’irrigue [son] corps que pour vous, pour [son] pays ». « Modi ! Modi ! », gronde la foule.

« Démocratie » et « diversité »

Pour le chef de gouvernement d’une nation devenue récemment la plus peuplée de la planète et la cinquième économie mondiale, l’Inde a en effet vocation de conduire l’humanité sur les chemins de sa rédemption. M. Modi a répété jeudi son concept de Vasudhaiva Kutumbakam (« le monde est une grande famille ») , terme sanskrit fondamentalement inclusif puisqu’il permettrait au pays de Gandhi de s’attribuer un rôle universel : « [L’écrivain français] Romain Rolland, n’a-t-il pas dit, rappelle M. Modi, que l’Inde était la mère de toutes les civilisations ? »

Il vous reste 42.03% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source: Le Monde