Témoignage - Philippe a mis un moteur de Tesla Model 3 dans sa DeLorean DMC-12 !

July 14, 2023
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Nom de Zeus ! Comment oublier la DeLorean DMC-12 dont le capital sympathie a augmenté avec le succès de la trilogie « Retour vers le futur » ? Quelle surprise d’en trouver une branchée pour recharge de ses batteries au e-Garage Revolte de Carquefou ! Philippe nous explique son projet de rétrofit.

Un peu d’histoire

Explorer une casse automobile ou un garage est souvent source de surprises, et même de bonnes surprises. Les participants à la Nuit de la Revolte du jeudi 29 juin 2023 ont connu cette joie, à plusieurs reprises. En particulier avec cette DeLorean DMC-12 en lévitation sur les quatre patins d’un pont de l’atelier.

Électrique ? Le pont, oui ! Non, mais la DeLorean ? Aussi. Le câble de recharge qui se branche derrière la plaque d’immatriculation, entre les deux feux arrière, ne laisse aucun doute. Dessinée chez Italdesign, « et directement signée Giugiaro », la carrosserie en acier inoxydable brossé a conservé tout son charme.

Cette voiture mythique au cahier des charges ambitieux déroule pourtant une histoire des plus chaotiques. Conçue pour séduire sans sacrifier sur le papier la sécurité selon les critères du début des années 1980, la DMC-12 doit supporter le voile de la faillite dès 1982. De nombreux flous subsistent encore, notamment sur cette affaire de trafic de cocaïne dont a été accusé le fondateur John DeLorean.

La version du FBI, à l’époque, était que l’ancien vice-président de General Motors aurait ainsi voulu sauver son entreprise. « John DeLorean a finalement été acquitté, car le juge a considéré que le FBI avait tellement habillé son piège qu’il ne serait pas passé à l’acte sans lui », tient à préciser Philippe.

Un bloc pas à la hauteur…

Italie, Irlande du Nord, et même France : la DMC-12 est bien plus européenne que l’on pourrait le croire. Le premier prototype, celui de 1976, embarquait un moteur 4 cylindres emprunté à la Citroën CX qui devait alors se contenter de blocs améliorés de la DS.

Clairement pas à la hauteur, cette dotation a été revue en faveur du PRV (Peugeot, Renault, Volvo) 6 cylindres 2,8 l qui a animé en particulier chez le Lion des coupés 504 et berlines 604, la R30 du Losange et la série 260 du constructeur suédois. C’est mieux, mais les performances restaient trop limitées par rapport aux prétentions de départ.

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« Le rétrofit de la DeLorean est à la fois un projet personnel et un projet d’entreprise. Je cherchais justement un modèle relativement ancien de voiture historiquement équipé d’un moteur pas très passionnant », nous explique Philippe, lors de notre rencontre au e-Garage Revolte de Carquefou. « Plus qu’un problème de fiabilité, on peut reprocher à ce bloc un décalage profond entre les performances escomptées et le réel, surtout en boîte auto et avec un pot catalytique », ajoute-t-il.

… Remplacé par un moteur de Tesla Model 3

La DeLorean DMC-12 qui nous nargue sur le pont n’a pas été transformée d’hier : « Trouver cette voiture n’a pas été très compliqué. Je suis passé par un forum dédié. Au bout de 3 mois, j’avais cette DMC-12 dont le moteur venait d’être refait. La conversion s’est étalée sur une année, à cheval sur 2018 et 2019 »

Jusqu’à présent, Philippe n’a jamais communiqué sur ce projet. Il le fait en exclusivité pour Automobile Propre, grâce à une mise en relation orchestrée par Jérémie Noirot, le génial technicien des e-Garage Revolte : « Je souhaitais aller jusqu’au bout du prototype avant de communiquer officiellement. Pour l’instant, le projet est en stand-by, en raison de la complexité du décret sur le rétrofit, et de quelques finitions techniques dont Revolte va se charger ».

Qu’est-ce qui coince ? « La législation n’admet pas aujourd’hui l’emploi de pièces d’occasion dans le kit de conversion et le sourçage de pièces haut de gamme est des plus délicats. Nous avons utilisé un moteur électrique récupéré à l’avant d’une Tesla Model 3. Il a été placé en position centrale arrière à la place de la boîte de vitesses qui a donc été supprimée ».

Elle atteint les 88 miles à l’heure

Avec une pointe de malice dans les yeux, Philippe nous assure que sa DeLorean retrofitée « atteint les 88 miles par heure », soit un peu plus de 140 km/h : « C’est la vitesse qui permet à la DMC-12 de ‘Retour vers le futur’ de voyager dans le temps ». Et la batterie ? « Réalisé par une startup, le pack lithium-ion offre une capacité énergétique de 35-40 kWh. Notre DMC-12 est roulante et fiable. En ville, son autonomie dépasse les 200 kilomètres ».

La conversion a été voulue de façon entièrement réversible : « Nous n’avons percé que six trous dans le châssis en tout. Des pièces en fibre de verre ont été découpées, mais elles sont aisément restaurables. Au besoin, le moteur PRV et sa boîte de vitesses pourraient être remis en place sans problème ».

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Le refroidissement a fait l’objet d’une attention particulière : « Nous avons mis en place un double système. Le premier pour refroidir la batterie, et l’autre pour le moteur ». Notre interlocuteur se réjouit du résultat : « La voiture convertie est conforme à l’originale en matière de poids. Elle est même améliorée grâce à une meilleure répartition, avec davantage de masse à l’avant ».

Une série de 20 voitures rétrofitées par an

Passionné de voitures anciennes, Philippe espère une évolution de la législation en faveur du rétrofit électrique : « Ce serait bien de pouvoir obtenir une réception à titre isolé. Mon rêve de départ est de convertir à l’électrique des voitures anciennes pour un usage quotidien. La réversibilité assure de pouvoir conserver la valeur en collection des modèles transformés ».

La DeLorean DMC-12 ne serait pas la seule à bénéficier d’un tel traitement : « Mon idée est de m’attaquer à un nouveau modèle chaque année dont nous pourrions sortir une vingtaine d’exemplaires converties à l’électrique ».

Il est aujourd’hui relativement aisé d’adapter légalement en France un véhicule au GNV ou au GPL. À l’heure où les projections en matière de dérèglement climatique s’alourdissent (pourquoi faut-il toujours qu’on ait un timing aussi serré ?), cette facilité mériterait être accordée rapidement au rétrofit électrique.

Moyennant bien sûr quelques impératifs. Comme une bonne répartition des masses, par exemple, et un niveau de sécurité a minima conforme à celui exigé à l’époque pour le modèle concerné.

Le rêve d’une DeLorean électrique

Le retour vers la DeLorean, et son futur en électrique, ont fait bouillonner bien des cerveaux. En 2011, une nouvelle entreprise baptisée « DeLorean Motor Company of Texas » avait annoncé une DMC-EV à batterie 30 kWh et moteur de 260 ch reprenant une présentation fidèle au coup de crayon original d’Italdesign. Sa diffusion n’aura pas été vraiment plus loin que dans les rêves des passionnés.

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Un peu plus de 10 ans après, le même studio italien a été approché pour rajeunir un style qui se voulait intemporel il y a une quarantaine d’années. Il en est sorti la DeLorean Alpha5 dont la parenté s’établit surtout avec les portes qui s’ouvrent désormais en élytre sur quatre places au lieu de deux.

Toutefois, l’histoire de la marque n’est toujours pas des plus simples en 2023. En mars dernier, nous apprenions par exemple que la série de 9 351 exemplaires serait réduite à 4 000 en raison de ruptures sur la chaîne d’approvisionnement.

La fièvre a par ailleurs gagné l’université de Stanford où une DMC-12 original a été modifiée. En plus d’être animée par deux moteurs électriques, elle est capable de réaliser des drifts de manière autonome.

Automobile Propre et moi-même remercions beaucoup Philippe pour sa confiance et son témoignage. Un grand merci également à Jérémie Noirot pour nous avoir mis en contact avec notre interviewé.

Source: Automobile Propre