Valence, laboratoire de l’alliance entre les conservateurs et l’extrême droite en Espagne
Des sympathisants du conservateur Carlos Mazon célèbrent son investiture au Parlement régional, à Valence (Espagne), le 13 juillet 2023. BIEL ALIñO/EFE/MAXPPP
Le hall de la grande poste de Valence ne désemplit pas en cette mi-juillet. « J’ai attendu une heure pour envoyer un colis. Du jamais-vu », se plaint Amelia Sanfeliu, retraitée de 66 ans au teint hâlé, vêtue d’une large robe pour supporter les 35 °C à l’ombre et l’humidité étouffante de la ville espagnole méditerranéenne. A ses côtés, des dizaines de personnes, en tongs et lunettes de soleil, attendent leur tour, munis des documents nécessaires pour voter aux élections législatives du dimanche 23 juillet. « C’est comme ça du matin au soir », soupire une employée au guichet.
Jamais auparavant l’Espagne n’avait organisé d’élections législatives en plein mois de juillet, entre deux canicules et alors que bon nombre de ses habitants sont en congés. Mais en dissolvant les Chambres au lendemain de la déroute de son parti aux élections locales du 28 mai, le président du gouvernement espagnol, le socialiste Pedro Sanchez, a débloqué le compte à rebours légal qui fixe un délai de cinquante-quatre jours, ni plus ni moins, pour convoquer les élections au Parlement et au Sénat. Résultat : plus de 2,6 millions d’Espagnols se sont inscrits pour voter par correspondance au scrutin de dimanche, alors qu’ils étaient moins d’un million aux élections de 2019. Débordés, partout dans le royaume, les bureaux de Correos, la poste espagnole, ont dû prolonger leurs horaires d’ouverture jusqu’à 22 heures et ouvrir samedi 15 et dimanche 16 juillet, afin de faire face au déferlement d’électeurs.
« Je serai peut-être à la plage le 23, alors j’ai préféré prendre les devants », explique Victor, professeur d’anglais de 40 ans, qui vote par correspondance pour la première fois. « Ces élections sont très serrées et chaque vote compte. Je ne peux pas rester les bras croisés face au risque que Vox [extrême droite] entre au gouvernement : ce sont des xénophobes, des homophobes et des machistes », ajoute-t-il. Lui a voté pour le mouvement de la gauche alternative Sumar, qui regroupe une quinzaine de partis à la gauche du Parti socialiste (PSOE) aux élections au Parlement et pour le PSOE au Sénat. « De toute façon, s’ils veulent gouverner, ils devront le faire ensemble. »
Bataille entre deux blocs
Le bipartisme, qui a longtemps prévalu en Espagne avant d’exploser en 2014 avec l’arrivée de nouveaux partis, a laissé place à une bataille entre deux blocs. D’un côté, le modèle politique au pouvoir depuis 2019 : une coalition entre le Parti socialiste et la gauche radicale, soutenue par les indépendantistes catalans. De l’autre, un possible gouvernement du Parti populaire (PP, droite) allié à Vox, comme ceux qui se sont généralisés après les élections locales dans des dizaines de communes et plusieurs régions d’Espagne. Dont la communauté de Valence.
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Source: Le Monde