" L’économie aura mis fin au “quick commerce” plus vite que la loi "
Un livreur de l’entreprise de quick commerce Getir, à Berlin, le 6 février 2023. ODD ANDERSEN / AFP
Ce mercredi 3 mai doit être présenté à l’Assemblée nationale le rapport de la mission d’information de la commission économique sur le quick-commerce. Il serait temps en effet que les députés se penchent sur la question avant qu’elle ne sorte complètement des radars. Cette activité de livraison en moins d’un quart d’heure de produits d’épicerie en ville risque bien de disparaître corps et âme avant même que les parlementaires n’aient eu le temps de proposer la moindre loi pour en limiter l’activité. Ce qui est tout de même frustrant pour un député.
Certaines fleurs de la nouvelle économie sont bien éphémères. Sitôt fleuries, sitôt fanées. Près d’une dizaine d’entreprises œuvraient en France dans ce secteur en 2001. Il n’en reste presque plus aujourd’hui.
Après avoir fait le ménage en rachetant le français Frichti et l’allemand Gorillas, la société turque Getir a demandé, le 20 avril, le placement en redressement judiciaire de sa filiale française. Et ce lundi 1er mai, le Financial Times nous apprend que le même Getir serait entré en négociation pour racheter l’un des derniers européens encore debout, l’allemand Flink.
Investisseurs évaporés
Ce dernier avait absorbé en 2022 le français Cajoo, qui, dans sa courte vie, avait juste eu le temps de s’allier à Carrefour. Quick-commerce, quick sortie. Dans ce ballet anarchique, les milliards se sont envolés en moins de temps que ne met un coursier sous-payé pour livrer chips et cacahuètes à un client pressé. Avant de disparaître, Gorillas avait réussi à lever 1,4 milliard d’euros.
Plus encore que l’absence de modèle économique en pleine inflation alimentaire, c’est l’évaporation des investisseurs qui a effacé ce métier aussi vite qu’il était né. La hausse des taux d’intérêt a fait éclater la bulle. Flink prévoit ses premiers bénéfices pour 2024. C’est beaucoup trop tard, et trop aléatoire dans un contexte économique aussi fragile.
La seule chance de Getir est que son principal financier, le fonds d’investissement d’Abou Dhabi Mubadala, est aussi celui de Flink. Son intérêt est donc de réduire au plus vite la concurrence pour tenter d’éviter la disparition des deux derniers acteurs en Europe. L’économie sera allée plus vite que la loi pour mettre un terme à cette prometteuse mais illusoire économie de la flemme.
Source: Le Monde