" L’inflation dure autant de temps que les causes qui la déclenchent "

July 23, 2023
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L’inflation est réapparue à l’échelle mondiale depuis l’automne 2021 et s’est stabilisée, en 2023, autour de 7 %. Va-t-elle refluer jusqu’à disparaître, ou bien le coût de la transition écologique et énergétique va-t-il la maintenir à un niveau élevé ?

Revenir à un taux d’inflation de 0 % ne serait pas souhaitable, car ce sont alors la déflation et la récession qui menacent ; il convient donc de viser plutôt un taux de 2 % à 3 %. Or un des outils performants pour juguler l’inflation est de relever les taux d’intérêt, c’est-à-dire le prix de l’argent prêté, afin de freiner le recours des entreprises, des ménages et des Etats au crédit. Comme l’économie emprunte en dernier recours aux banques centrales, ce sont les taux d’intérêt directeurs de ces banques qui doivent cibler le taux d’inflation souhaitable.

Cette cible est de 2 % en Europe et aux Etats-Unis, et de 3 % en Inde et en Chine, aux économies plus axées sur la croissance.

La relation entre inflation et croissance, entendue comme la combinaison entre amélioration de productivité de la force de travail, augmentation du capital et poussée de l’innovation, s’apparente à la relation entre la vitesse et le risque d’accident pour un conducteur de véhicule : à petite vitesse, le conducteur risque de somnoler ; à vitesse soutenue, il est plus attentif ; à grande vitesse, il court de grands risques.

Les trois causes du déclenchement

Peu d’inflation tend à ralentir la croissance, car, si les prix ou les salaires n’augmentent pas, les entreprises sont peu motivées à innover et les salariés à travailler. Avec entre 2 % et 5 % d’inflation, ils sont incités à maintenir une activité soutenue, facteur de croissance stable. Mais, au-delà de 10 % à 20 %, la paix sociale et donc la croissance sont déstabilisées. Conclusion : la bonne inflation n’est pas l’absence d’inflation, mais son maintien autour de 2 % à 4 %.

Mais l’inflation va-t-elle disparaître « naturellement » ? En fait, elle dure autant que les causes qui la déclenchent. On peut classer ces causes en trois catégories. La première, définie par l’économiste britannique John Maynard Keynes (1883-1946) dans les années 1930, rattache l’inflation à la différence entre l’offre et la demande, lorsque les produits viennent à manquer ou que leurs prix viennent à flamber, comme en période de guerre ou de pénurie économique.

La seconde, actualisée par l’économiste américain Irving Fisher (1867-1947) entre 1910 et 1920, met l’accent sur l’abondance de monnaie, qui permet au consommateur de poursuivre ses achats même quand les prix montent. La troisième, initiée par l’économiste américain Milton Friedman (1912-2006) dans les années 1950, insiste sur les anticipations des agents économiques : quand les prix augmentent, les agents anticipent qu’ils vont continuer d’augmenter durablement, et adaptent leurs comportements en conséquence (prix, salaires, placements).

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Source: Le Monde