Opération " Wuambushu " à Mayotte : les Comores ferment leurs ports aux bateaux français rapatriant les migrants
À peine commencée, l’opération « Wuambushu » coince déjà. Les Comores ont déclaré ce lundi avoir refusé l’accostage d’un bateau transportant des migrants en provenance de Mayotte, où les autorités françaises ont débuté cette intervention controversée, censée expulser un grand nombre de migrants clandestins vers l’archipel voisin.
La France espère en effet déloger des migrants illégaux des bidonvilles de Mayotte, département français situé dans l’océan Indien, et d’expulser les Comoriens présents illégalement sur le territoire vers l’île comorienne la plus proche, Anjouan, située à seulement 70 km. Quelque 1800 policiers et gendarmes participent actuellement à cette opération baptisée « Wuambushu » (reprise, en mahorais), à la demande du ministre français de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin.
Située entre Madagascar et la côte est-africaine et faisant géographiquement partie de l’archipel comorien, Mayotte s’est séparée des Comores en 1974 lors d’un référendum où les trois autres îles ont choisi l’indépendance. Elle est devenue département français en 2011 et l’Union des Comores refuse toujours d’y reconnaître la souveraineté de la France. De nombreux migrants africains et notamment comoriens périssent régulièrement dans des naufrages en tentant chaque année de rallier clandestinement Mayotte, notamment à bord de petites embarcations de pêche à moteur appelées kwassa kwassa. Selon l’Institut national des statistiques français (Insee), près de la moitié des 350 000 habitants de Mayotte ne possèdent pas la nationalité française mais un tiers des étrangers de l’île y sont nés.
Mais les autorités comoriennes ont plusieurs fois déclaré ne pas avoir l’intention d’« accueillir des expulsés issus de l’opération ». Moroni a multiplié les appels à Paris pour annuler l’opération, disant ne pas avoir les moyens d’accueillir un afflux de migrants. Et d’intenses tractations ces dernières semaines avaient laissé planer la possibilité d’un accord de dernière minute. Les Comores ont finalement décidé de suspendre le trafic de passagers dans le port où les expulsés comoriens sont habituellement débarqués.
« Aucun expulsé ne rentrera »
« Le port de Mutsamudu (sur l’île comorienne d’Anjouan) n’est pas en mesure d’opérer sur l’embarquement et débarquement de passagers de ce jour jusqu’au 26 avril 2023, date à laquelle nous vous informerons de l’éventuelle reprise des opérations », ont annoncé les services maritimes dans une note adressée à une compagnie maritime et dont l’AFP a eu copie. « Tant que la partie française décidera de faire des choses de façon unilatérale, nous prendrons nos responsabilités. Aucun expulsé ne rentrera dans un port sous souveraineté comorienne », a déclaré le ministre comorien de l’Intérieur, Fakridine Mahamoud.
Le président comorien, Azali Assoumani, qui assure depuis février la présidence de l’Union africaine, avait dit espérer « que l’opération sera annulée », en reconnaissant « n’avoir pas les moyens de (la) stopper par la force ». Les Comores se sont pourtant engagées dans un accord signé en 2019 à « coopérer » avec Paris sur les questions d’immigration en échange d’une aide au développement de 150 millions d’euros.
Source: Le Parisien