Réforme des retraites : " “L’opération catharsis” d’Emmanuel Macron se heurte au tempérament présidentiel "

April 24, 2023
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Emmanuel Macron visite l’usine de bois Mathis à Muttersholtz (Bas-Rhin), le 19 avril 2023. JEAN-CLAUDE COUTAUSSE POUR « LE MONDE »

Désireux de purger la crise des retraites, qui l’a plongé dans l’impopularité et risque de paralyser son mandat, Emmanuel Macron déroule l’« opération catharsis » qu’il a dessinée à l’Elysée. Celle-ci passe par une omniprésence médiatique, ad nauseam : saturer l’espace pour catalyser la colère (« Il n’y a rien de pire que la colère rentrée, il faut que ça sorte », explique le ministre de la transformation et de la fonction publiques, Stanislas Guerini), tout en faisant diversion.

Après la crise des « gilets jaunes », le président de la République avait lancé le « grand débat », répondant aux questions des élus, partout en France, pendant de longues heures, moyen (symbolique) de renouer avec le pays. Même chose depuis dix jours mais cette fois, sans intermédiaires : sur le terrain, il multiplie les « petits débats » (comme l’a joliment théorisé le ministre de l’industrie, Roland Lescure, dans l’émission « Dimanche en politique », sur France 3) au contact des Français, affrontant physiquement la colère de cette « foule » (sic) qu’il avait sévèrement critiquée.

M. Macron se montre tout aussi actif sur le front médiatique. Dimanche, il a accordé une interview fleuve aux lecteurs du Parisien. Pas d’annonces tonitruantes – il confirme vouloir « lancer un grand projet de restauration écologique de nos écoles » – mais il balaye tous les sujets (immigration, inflation, écologie, institutions…), afin de signifier qu’au-delà des retraites, et du rejet que cette réforme continue de susciter, la vie doit continuer. Un « président du quotidien » qui « parle de tout avec tous », louent ses proches.

Clauses de revoyure

En vieux routier, le maire Les Républicains de Meaux, Jean-François Copé, s’amuse de cette « habile » séquence de « communication politique ». S’il la juge utile pour « faire atterrir les tensions », il redoute que le chef de l’Etat en profite pour mettre « au congélateur » la vie politique. « Il y a beaucoup de phrases, beaucoup de choses dans tous les sens, on va tout faire, tout refaire… Mais, pendant cent jours, il ne va rien se passer d’important ! », a lancé, le 20 avril sur BFM-TV, l’ancien ministre, qui se demande comment M. Macron va pouvoir « gérer les quatre années » qui lui restent, afin que celles-ci soient « utiles ».

De fait, sur plusieurs sujets – référendum, institutions, Service national universel… –, le président de la République reste flou, indiquant qu’il pourrait soit faire, soit… ne pas faire. Sur d’autres (l’inflation), il semble se contenter d’un rôle d’observateur, prédisant des jours difficiles (« Je vais être honnête, les prix alimentaires, ça va être dur jusqu’à la fin de l’été ») mais sans annoncer de mesures immédiates. La première ministre, Elisabeth Borne, doit détailler sa feuille de route mercredi.

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Source: Le Monde