Au Kenya, le pasteur Mackenzie jugé pour terrorisme après la découverte de dizaines de cadavres de personnes mortes de faim dans la forêt
Le pasteur Paul Mackenzie (au centre) et l’un de ses coaccusés (à droite), au tribunal de Malindi (Kenya), le 2 mai 2023. SIMON MAINA / AFP
Tandis que la police continue de creuser la terre ocre de la forêt de Shakahola à la recherche de corps, le pasteur Paul Nthenge Mackenzie apparaissait mardi 2 mai devant les juges du tribunal de Malindi, sur la côte du Kenya. Vêtu d’une tenue de sport rose et noire, l’homme de 51 ans a le regard tranquille ; il est pourtant poursuivi pour « terrorisme » par la justice kényane. A l’issue de l’audience, le procès a été transféré à Mombasa, la deuxième ville du pays, où la cour habilitée à traiter des actes de terrorisme ouvrira le dossier vendredi.
L’évangéliste se terre dans le silence mais les fouilles se poursuivent à Shakahola, située à deux heures de route de Malindi, où ce pasteur a bâti son église (Good News International Church, « Eglise internationale de la bonne nouvelle ») et sa ferme. C’est dans ce bois de 300 hectares, qui ressemble désormais à un immense charnier, que 110 corps ont été déterrés depuis le 21 avril. Des survivants continuent d’être retrouvés, inconscients, à bout de forces. Mardi encore deux femmes ont été sauvées.
Les recherches ont un temps été suspendues pour désengorger la morgue de Malindi, qui déborde de corps. Elles ont désormais repris et plusieurs parcelles sont toujours excavées, lorsque les pluies cessent. La Croix-Rouge kényane estime à 410 le nombre de personnes portées disparues. La moitié serait des enfants.
Jeûne extrême pour « rencontrer Jésus »
Les premières autopsies réalisées lundi révèlent ce que tout le Kenya redoutait. Les dix premiers corps « avaient des caractéristiques de famine », assure le chef des services nationaux de médecine légale, le docteur Johansen Oduor.
Prédicateur radical, Paul Nthenge Mackenzie prédisait la fin du monde pour juin 2023. Afin de « rencontrer Jésus » avant cette échéance, il préconisait un jeûne extrême à ses paroissiens, qui s’est avéré fatal. « Il n’y avait pas de nourriture dans les estomacs, la couche de graisse était très fine [sur les corps] », selon le médecin légiste.
Aujourd’hui face à la justice aux côtés de huit coaccusés, Paul Mackenzie fait l’objet de multiples enquêtes : meurtre, aide au suicide, enlèvement, radicalisation, crimes contre l’humanité, cruauté envers des enfants, fraude et blanchiment d’argent. « Ce sont des faits de terrorisme ! », s’est violemment emporté le président de la République du Kenya, William Ruto, au sujet du drame. Devant l’émoi suscité par ce massacre sordide dans la nation d’Afrique de l’Est, le chef de l’Etat promet la mise en place d’une commission présidentielle.
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Source: Le Monde