La bataille du moratoire est lancée autour de l’exploitation minière des grands fonds océaniques
Une éponge carnivore photographiée lors d’une récente expédition dans les abysses du Pacifique Nord-Est. NATIONAL OCEANOGRAPHY CENTRE /AFP
La guerre est désormais déclarée entre les pays partisans de l’exploitation minière des grands fonds océaniques et ceux qui s’y opposent fermement, ou qui se rallient à l’idée qu’un moratoire, ou une « pause de précaution », s’impose face à l’accélération du changement climatique. La réunion annuelle de l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) a tourné à l’aigre, en prenant fin dans la nuit de vendredi 28 à samedi 29 juillet.
Certes, le conseil de cette organisation créée en 1994 en vertu de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982 (dite de Montego Bay) avait acté il y a quelques jours qu’aucune autorisation d’exploitation des abysses ne serait accordée tant qu’un code minier définissant les règles du jeu ne serait pas adopté, ce qui ne sera pas le cas avant 2025. En revanche, sous l’impulsion de la Chine qui freinait des quatre fers, les 168 Etats membres réunis depuis cinq jours en assemblée générale à Kingston, capitale de la Jamaïque, n’ont pas été en mesure d’inscrire à leur ordre du jour l’ouverture d’un débat sur le principe même d’aller exploiter le plancher des océans, comme le réclamaient la France, le Chili et le Costa Rica, ainsi que les archipels du Vanuatu et des Palaos.
Tout juste a-t-il été convenu, à la dernière heure, d’inclure à l’ordre du jour provisoire de 2024 un point sur « la politique générale de l’Autorité en faveur de la protection et la préservation du milieu marin ». Emmanuel Macron l’a dit dès jeudi 27 juillet depuis le Vanuatu, lors de sa tournée en Océanie, l’objectif de tenue d’un débat demeure, afin d’obtenir une prise de position de l’AIFM en faveur d’un moratoire d’ici à la prochaine Conférence des Nations unies sur les océans organisée conjointement par la France et le Costa Rica à Nice, en juin 2025.
« La bataille est désormais ouverte. Au moins, les deux camps sont maintenant identifiés », observe François Chartier, chargé de campagne océan à Greenpeace France. « Il était difficile de croire qu’il serait si compliqué d’avoir une simple discussion sur la protection de l’environnement au sein d’un organisme affilié à l’ONU, mais c’est un premier pas positif sur une longue route. Pour la première fois dans l’histoire de l’AIFM, la question d’un débat de fond a été évoquée dans une enceinte qui, généralement, ne s’écarte jamais beaucoup du statu quo », note Emma Wilson, conseillère politique pour le compte de la Coalition pour la conservation des profondeurs océaniques, structure qui fédère une bonne centaine d’ONG, dont Greenpeace, le Fonds mondial pour la nature (WWF) et la Fondation pour une justice environnementale.
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Source: Le Monde