"Ça m'a coûté la perte de ma fille" : un an après la liquidation des maisons Phénix, les clients toujours sans réponse

July 31, 2023
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La société Géoxia, propriétaire du constructeur de maisons Phénix, était placée en liquidation judiciaire le 28 juin 2022. Malgré des acomptes de plusieurs milliers d'euros versés, des dizaines de clients ont vu s'envoler leurs projets, et envisageaient d'attaquer au pénal. Un an plus tard, rien n'a bougé.

30 mètres carrés supplémentaires. Une chambre, une salle de bain et un dressing de plus. Voilà ce que prévoyait Flavien Klisowska, qui a fait construire il y a sept ans sa maison à Chécy, dans le Loiret, avec l'entreprise Phénix. C'est donc avec sa filiale Phénix Évolution qu'il choisit d'entreprendre des travaux d'agrandissement.

Flavien Klisowska emprunte 100 000 euros, et verse un acompte de 47 000. Le permis de construire est délivré le 7 janvier 2022. Et puis, plus rien. Le 28 juin, l'entreprise est placée en liquidation judiciaire, aux côtés de Maison Phénix et Maison familiale, toutes filiales du groupe Geoxia.

Les derniers dans l'ordre des créanciers

Le Loirétain se retrouve sans travaux engagés, l'argent versé envolé. "Aujourd'hui, certaines personnes sont très loin, avec notre argent, souffle-t-il.

On s'est fait escroquer, berner. Il ne faut pas avoir peur des mots. Flavien Klisowska, client de Maison Phénix

Son extension, il la prévoyait pour accueillir les enfants de sa compagne. "On devait avoir une chambre de plus, on s'est retrouvés à quatre enfants et deux adultes, ça a créé des tensions." Peu après l'emménagement, sa fille choisit d'aller vivre chez sa mère. "Ça n'était pas la seule raison, mais ça n'a pas amélioré les choses, estime-t-il. Ça m'a coûté la perte de ma fille."

Avec les autres clients floués, il participe à l'animation d'une page Facebook dédiée, qui compte plus de 250 participants dès l'été 2023. Et de nombreux, très nombreux témoignages désabusés.

À l'époque, tous estiment que l'entreprise était au courant de la situation financière du groupe et a malgré tout réclamé des acomptes avant sa mise en liquidation. Les acheteurs rassemblés espèrent alors porter l'affaire au pénal. "Si on compte sur le civil, on n'aura rien, expliquait à France 3, Coralie Mercier, habitante de Châteauneuf-sur-Loire qui avait versé un acompte de 14 000 euros pour le réaménagement de combles. On est derniers dans l'ordre des créanciers, car il y a trop de dettes. Mais le but c'est qu'ils soient condamnés".

Non non rien n'a changé

Sauf que, un an plus tard, l'espoir a fait place à la résignation. "Rien n'a changé, et rien ne changera. On sait très bien que c'est perdu", lance Flavien Klisowska :

On a essayé de se renseigner auprès d’avocats, ça a été compliqué. Comme chaque cas est particulier, et prendre un avocat coûte cher, tous ne pouvaient pas se le permettre. Le montant était trop important pour des personnes qui avaient mis 5 ou 10 000 euros. Flavien Klisowska

D'autant que la législation n'est pas à l'avantage des victimes. En cas de construction, il y a garantie de livraison, et donc intervention de l'assurance si liquidation du constructeur. Mais en cas de rénovation (comme le réaménagement de combles ou l'agrandissement d'une maison), aucune protection n'est offerte. Malgré la certitude intime des clients de s'être fait flouer, "même si on engageait un avocat, le vide juridique fait qu'il y avait très peu de chance de récupérer la somme, tout ou partie".

Et si en plus, y'a personne

Depuis, le groupe Facebook est quelque peu tombé en sommeil. "Tout le monde s'est résolu, concède Flavien Klisowska. Soit à avoir perdu de l'argent, soit à refaire un emprunt." Lui-même devra s'acquitter de 250 euros par mois pendant les 20 prochaines années pour un espace de vie qui ne verra jamais le jour. Il dit n'avoir aucun contact pouvant l'aider, et n'avoir reçu aucune réponse à ses courriers au liquidateur. "J'étais retourné sur les lieux six mois après, il n'y avait plus personnes, des papiers en vrac... Ils sont partis du jour au lendemain."

Désormais, il souhaite juste faire parler de son histoire, de celles des autres acheteurs. "Moi ça va, ça ne m'a pas empêché de vivre, mais pour des personnes pas aisées, en plus avec la hausse des prix ces derniers temps..." Parler pour alerter, "que les politiciens fassent quelque chose", que "ça serve de leçon".

Flavien Klisowska espère ainsi un texte de loi pour assurer une protection des acheteurs dans les cas de rénovation. Il dit avoir, avec plusieurs autres clients, tenté de contacter des maires et des préfets. "Des courriers ont été envoyés, certains avaient dit qu'ils s'y intéresseraient. Mais c'est comme tout : sans retentissement, il ne se passe rien." Et, de fait, depuis, il ne se passe plus rien.

Source: France 3 Régions