Altice France miné par des accusations de corruption, une dirigeante suspendue
« Le juge a opté pour la prison à domicile » a déclaré aux médias portugais l’avocat d’Armando Pereira le 24 juillet dernier. Cofondateur d’Altice en 2002 aux côtés du milliardaire français Patrick Drahi, l’homme d’affaires a été mis en examen pour onze délits financiers, dont corruption et blanchiment. Son avocat a réfuté les accusations portées à son client les qualifiant « d’un ensemble de présomptions ».
« L’opération Picoas »
L’homme d’affaires portugais a été interpellé le 13 juillet dernier par les autorités portugais. En parallèle, une série de perquisitions a été menée notamment au siège d’Altice Portugal basé à Lisbonne. L’enquête s’inscrit dans le cadre de l’« opération Picoas » qui met en cause plusieurs responsables ou anciens cadres d’Altice. Elle porte sur des faits susceptibles de constituer des délits « de corruption dans le secteur privé, fraude fiscale, faux et usage de faux et blanchiment », a indiqué le ministère public.
D’après les médias portugais, Armando Pereira qui a été entendu par la justice est soupçonné dans une affaire concernant la vente de biens immobiliers pour 15 millions d’euros. Ces immeubles appartenaient à l’opérateur historique Portugal Telecom, entre-temps racheté par Altice. Ces ventes auraient lésé à la fois le fisc portugais et Altice International. Le scandale nuit à la réputation du groupe mais aussi à ses capacités de réduction de son endettement.
20 milliards euros de dette
« Il y a une forme d’inquiétude » exprime Abdelkader Choukrane, responsable syndical UNSA au niveau du groupe Altice. En France, Altice est la maison mère de SFR ainsi que des chaînes de télévision BFM et RMC. En 2022, le chiffre d’affaires d’Altice France s’élevait à 11,3 milliards tandis que sa dette dépassait les 20 milliards d’euros. À la demande des syndicats, un conseil social et économique central exceptionnel a été organisé ce mercredi 2 août. « Ce qu’on a appris par la presse portugaise crée des inquiétudes sur l’endettement de SFR à terme. Comment va réagir la communauté financière ? » s’interroge Abdelkader Choukrane. Tandis que le pôle médias suscite d’ores et déjà des convoitises.
Cette affaire « n’est pas quelque chose qui était complètement invisible en raison des méthodes utilisées qui imposaient de plus en plus de prestataires portugais » avance de son côté Laurent Penon, membre de la CFDT chez Altice.
Au cours de la réunion, la suspension de Tatiana Agova-Bregou, la patronne des contenus, acquisitions et partenariats chez Altice, a été révélée. Elle a été mise en cause dans des écoutes de la justice portugaise.
Une enquête interne
Contacté par Ouest-France, Altice France a affirmé ne pas vouloir faire de commentaires. Dans un mail interne envoyé à l’ensemble de ses employés, Altice France affirme cependant travailler « activement avec comme priorité la protection de vos intérêts, ceux du groupe et de nos clients ». La direction affirme également dans ce courrier avoir lancé « une enquête interne afin d’identifier précisément tout comportement et pratique qui seraient non conformes aux lois ».
Les 7 et 8 août prochains le PDG d’Altice, Patrick Drahi, présentera lors de conférences téléphoniques les résultats semestriels d’Altice international et d’Altice France. Une prise de parole très attendue où l’homme d’affaires devra tâcher de rassurer ses investisseurs.
Source: Ouest-France