Maxi-coup de filet contre la redoutée mafia calabraise en Europe
La police allemande escorte une personne arrêtée à Hagen, dans l'ouest de l'Allemagne, le 3 mai 2023, dans le cadre d'une opération contre la mafia italienne 'Ndrangheta ( AFP / Alex Talash )
Une opération de police européenne de grande envergure ciblant la mafia calabraise, la très redoutée 'Ndrangheta, a donné lieu mercredi à 132 arrestations, des perquisitions et des saisies dans dix pays, dont l'Italie, l'Allemagne et la France.
Il s'agit du "coup le plus dur infligé à ce jour à l'organisation criminelle italienne", a souligné Europol, l'agence de l'Union européenne pour la coopération policière.
Les autres pays concernés par cette opération, baptisée Eureka, sont en Europe l'Espagne, le Portugal, la Slovénie, la Roumanie et la Belgique, et en Amérique latine le Brésil et le Panama, a précisé Europol, qui a coordonné les différentes polices impliquées.
La 'Ndrangheta domine le marché de la cocaïne sur le Vieux Continent, où elle est aussi impliquée dans des affaires de blanchiment d'argent, de corruption et de violence.
L'enquête a d'ailleurs confirmé d'importants flux de drogues entre l'Amérique du Sud et l'Europe, gérés notamment par le clan de San Luca en Calabre, la pointe de la Botte italienne.
Les familles à la tête de ce réseau criminel sont aussi impliquées depuis des décennies dans des violences pour se disputer ce juteux marché, qui ont culminé avec le massacre de Duisboug en Allemagne, en 2007.
Une douzaine de personnes ont été interpellées en Belgique, une vingtaine en Allemagne, et une centaine d'autres dans la péninsule pour association mafieuse, trafic de drogue, trafic d'armes, fraude fiscale et blanchiment d'armes.
Selon le parquet italien, des sociétés et biens immobiliers ont en outre été saisis pour un montant de 25 millions d'euros.
Dans le cadre de ces investigations, lancées au niveau européen il y plus de trois ans, les autorités italiennes et belges ont pu attribuer à la 'Ndrangetha l'importation et le trafic de près de 25 tonnes de cocaïne, pour la période allant d'octobre 2019 à janvier 2022.
- 2.700 policiers -
La cocaïne sud-américaine transitait par les ports de Gioia Tauro (Calabre) et Anvers (Belgique) mais aussi d'autres ports en Allemagne, en Espagne et aux Pays-Bas (Rotterdam), grâce aux accords noués par la 'Ndrangheta avec l'organisation criminelle colombienne du Clan del Golfo et un autre groupe criminel de souche albanaise opérant en Equateur et en Europe.
Le magistrat fédéral Antoon Schotsaert, le porte-parole Eric Van Duyse et le procureur du Limbourg Guido Vermeiren lors d'une conférence de presse sur une opération européenne antimafia, à Bruxelles, le 3 mai 2023 ( AFP / Simon Wohlfahrt )
Les enquêteurs ont aussi mis au jour une proposition de fournir à une organisation paramilitaire brésilienne, Primeiro Comando da Capital (PCC), un conteneur rempli d'armes de guerre par l'intermédiaire de criminels pakistanais en échange de l'acheminement d'énormes quantités de drogues au port de Gioia Tauro.
L'argent issu de ces multiples trafics a été réinvesti, entre autres, dans le secteur immobilier, des hôtels, des restaurants et des supermarchés, notamment en Allemagne, en Belgique, en Italie, au Portugal, au Brésil, en Uruguay et en Argentine.
Plus de 2.700 policiers ont été mobilisés sur le terrain pour ce coup de filet lancé mercredi à l'aube, dont 1.400 rien que pour l'Italie.
En Allemagne, une centaine de perquisitions ont été menées, selon les autorités des Länder de Bavière, de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, de Rhénanie-Palatinat et de Sarre.
Le ministre de l'Intérieur de Bavière Joachim Herrmann a qualifié cette opération de "coup sensible porté à la 'Ndrangetha", considérée comme la mafia la plus riche et la plus puissante d'Italie avec des ramifications dans une quarantaine de pays.
En août 2007, un épisode sanglant avait mis en lumière l'implantation de la 'Ndrangheta en Allemagne: les corps de six Italiens, âgés de 16 à 39 ans et membres d'un des deux clans de San Luca, avaient été découverts criblés de balles dans deux véhicules devant le restaurant italien "Da Bruno" à Duisbourg (ouest).
Ce massacre était, selon les enquêteurs, une vendetta après l'assassinat fin 2006 de Maria Strangio, épouse de Giovanni Nirta, chef du clan rival.
Source: Boursorama