L’ONU alerte sur la gravité record des crises alimentaires dans le monde
Clinique mobile de Médecins sans frontières (MSF) destinée à traiter les cas de malnutrition modérée et sévère, dans le village de Befeno, à Madagascar, le 2 septembre 2021. RIJASOLO / AFP
C’est un rapport qui sonne comme un constat d’échec : 250 millions de personnes dans le monde sont en situation d’insécurité alimentaire aiguë (le dernier stade avant la famine) et requièrent une aide urgente, un chiffre jamais atteint depuis que les Nations unies ont commencé à documenter l’évolution de la population confrontée au plus haut niveau de crise alimentaire, en 2017. Publié mercredi 3 mai, le rapport mondial sur les crises alimentaires est « un réquisitoire cinglant sur l’échec de l’humanité à faire progresser l’objectif de développement durable d’éradiquer la faim et de parvenir à la sécurité alimentaire et à une meilleure nutrition pour tous, s’insurge Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU, en préambule de ce document. Au contraire, nous allons dans la mauvaise direction ».
Le nombre de personnes au bord de la famine a ainsi bondi de 83 millions en 2016 à 193 millions en 2021, puis 253 millions en 2022, soit un triplement en six ans. Cette hausse s’explique en partie par l’élargissement du nombre de pays évalués, mais aussi par l’aggravation de l’insécurité au sein même de ces pays. C’est la quatrième année consécutive que ce chiffre progresse.
Contrairement à d’autres évaluations onusiennes qui traquent l’évolution de la faim et de l’insécurité alimentaire chronique de façon plus globale, ce rapport porte sur les situations de crise les plus aiguës, avec une évaluation affinée des niveaux d’insécurité alimentaire dans cinquante-huit pays. « Concrètement, on parle de foyers vulnérables, dont les vies et les moyens de subsistance sont menacés », précise dans un communiqué Rein Paulsen, directeur du bureau des urgences et de la résilience de l’Organisation de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Ce rapport, cosigné par plusieurs agences internationales – Programme alimentaire mondial (PAM), FAO, Coordination des affaires humanitaires, Unicef… –, se veut ainsi un guide pour aiguiller l’action internationale la plus urgente.
Des causes multiples
Les besoins sont énormes. En matière de population concernée, la République démocratique du Congo est le pays qui compte les plus gros contingents de personnes souffrant de faim aiguë (26,4 millions), suivie par l’Ethiopie (23,6 millions), l’Afghanistan (20 millions), le Nigeria, le Yémen, la Birmanie, la Syrie, le Soudan, l’Ukraine et le Pakistan.
Pour chacun des pays concernés, les causes de la faim sont multiples : les chocs économiques (y compris l’impact socio-économique persistant de la pandémie de Covid-19 et des conséquences de la guerre en Ukraine) sont la première cause de la faim dans vingt-sept pays analysés ; dans dix-neuf pays et territoires, ce sont les conflits et violences armées qui plongent les populations dans l’insécurité alimentaire aiguë ; et dans douze pays, les extrêmes climatiques sont le principal facteur de vulnérabilité. Mais dans beaucoup de territoires, ces causes s’accumulent, se renforcent et entraînent les populations dans une spirale de la faim.
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Source: Le Monde