Contournement autoroutier de Rouen : l'usage de drones lors d'un rassemblement invalidé par la justice
Le tribunal administratif de Rouen a suspendu un arrêté préfectoral qui prévoyait l'utilisation de drones lors d'un festival prévu à Léry (Eure), du 5 au 8 mai, en opposition au projet de contournement autoroutier à l'est de Rouen.
Le tribunal administratif de Rouen, statuant en référé, a suspendu vendredi 5 mai un arrêté préfectoral qui prévoyait l'usage de drones dans le cadre d'un rassemblement ce week-end contre le projet de contournement autoroutier à l'est de Rouen. «L'exécution de l'arrêté du préfet de l'Eure du 3 mai 2023 qui autorise la captation, l'enregistrement et la transmission d'images par des aéronefs à l'occasion du festival “Des bâtons dans les routes” prévu à Léry du 5 au 8 mai 2023 est suspendue», écrit le juge des référés dans cette décision que l'AFP a pu consulter. Le magistrat estime qu'en l'état de l'instruction, le préfet «ne justifie pas (...) de la nécessité de recourir à des caméras installées sur des aéronefs».
Selon les organisateurs, le rassemblement à Léry (Eure) se veut «à la fois familial, festif, naturaliste, instructif et déterminé pour affirmer notre opposition au projet destructeur d'autoroutes à l'est de Rouen». Pour justifier cet arrêté, «le préfet de l'Eure a considéré que le rassemblement prévu était susceptible d'entraîner des troubles graves à l'ordre public», rappelle le juge. Selon le juge, le préfet se référait aux affrontements très violents survenus lors de la manifestation des 25 et 26 mars à Sainte-Soline (Deux-Sèvres), après l'appel lancé notamment par le collectif Les Soulèvements de la Terre également coorganisateur du festival «Des bâtons dans les routes».
«Effet dissuasif»
Le préfet estimait «nécessaire», eu égard à l'ampleur de la zone à sécuriser, aux caractéristiques du site, «de disposer d'une vision en grand-angle pour limiter l'engagement des forces au sol», rappelle le magistrat. «Il résulte cependant de l'instruction (...) que ce festival se présente comme (...) familial», souligne le juge. «La seule circonstance qu'il soit co-organisé par le collectif “Les soulèvements de la terre” (...) ne suffit pas à caractériser la possibilité de survenue de troubles graves à l'ordre public», estime le juge.
À lire aussiSainte-Soline: «Vraie violence et fausse nouvelle»
C'est aussi l'argument avancé par l'avocate des associations organisatrices de l'événement Chloé Chalot qui a l'audience, a estimé que «faire référence à Sainte-Soline ne suffit pas à caractériser un trouble grave à l'ordre public». «Est-ce qu'on va mettre un drone à chaque festival, à chaque kermesse ou rassemblement d'agriculteurs ?» s'est interrogée l'avocate s'inquiétant de «l'effet dissuasif» d'une telle mesure vis-à-vis des personnes envisageant de se rendre sur le site. Le gouvernement envisage la dissolution des Soulèvements de la Terre, qui fédère des dizaines de collectifs locaux engagés sur des enjeux environnementaux.
Un événement «festif»
Selon un représentant de la préfecture à l'audience, l'arrêté prévoyait l'utilisation de «deux drones» avec 45 à 50 minutes d'autonomie de vol. «Les drones n'ont pas vocation à surveiller et ficher les festivaliers (...) en cas d'alerte au sol», ils servent à «vérifier la nature des actions», a-t-il fait valoir. «L'événement est présenté comme festif, mais un certain nombre d'éléments ont permis de penser que des risques pourraient avoir lieu», a-t-il ajouté. 1500 festivaliers sont attendus sur le site durant le week-end, selon la préfecture.
À lire aussiSainte-Soline: le rapport du BRGM au cœur d’une querelle d’experts
L'usage de drones a fait récemment l'objet de plusieurs recours administratifs. Autorisé par le tribunal administratif de Paris pour le cortège du 1er mai, le tribunal administratif de Rouen a lui suspendu le périmètre et les horaires d'utilisation des drones lors du défilé du 1er mai au Havre. Le 16 mai le Conseil d'État doit examiner un recours contre le décret publié le 20 avril par le gouvernement, portant sur l'utilisation des drones par les policiers et gendarmes.
Source: Le Figaro