Giro 2023 : Remco Evenepoel versus Primoz Roglic, troisième acte, un duel très attendu

May 06, 2023
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Primoz Roglic et Remco Evenepoel lors de la première étape du Tour de Catalogne, une boucle de 164,5 km avec départ et arrivée à Sant Feliu de Guixols (Espagne), le 20 mars 2023. JOSEP LAGO / AFP

Quand il s’agit de dresser la liste des prétendants à la maglia rosa, le maillot rose décerné au vainqueur du classement général du Tour d’Italie cycliste, Remco Evenepoel a bien quelques noms en tête. Joao Almeida, de l’équipe UAE Emirates, Geraint Thomas, d’Ineos Grenadiers, ou encore Aleksandr Vlasov, de Bora-Hansgrohe. Mais le champion du monde belge le reconnaît sans fausse modestie : au jeu des pronostics, « c’est du 50-50 » entre lui et Primoz Roglic.

Depuis des semaines, les suiveurs du peloton salivent à l’approche d’une 106e édition du Giro, présentée comme l’acte III du duel entre le jeune leader de la Soudal Quick-Step, fraîchement auréolé de son deuxième Liège-Bastogne-Liège, et le Slovène de la Jumbo-Visma. Et quoi de mieux qu’un contre-la-montre inaugural d’un peu plus de 19 kilomètres, samedi 6 mai, dans la région des Abruzzes – à l’est de Rome –, en guise d’amuse-bouche ? Le Belge de 23 ans affectionne particulièrement cet exercice, dont son aîné de dix ans est le champion olympique en titre.

Avant de prendre le départ de la boucle transalpine, Remco Evenepoel et Primoz Roglic ont pu se jauger à deux reprises sur des courses par étapes, en Espagne. Avec, là encore, un bilan à « 50-50 ». En septembre 2022, le Belge s’est adjugé la Vuelta, devenant par la même occasion le premier représentant du « plat pays » à s’imposer sur un grand Tour depuis… le 28 mai 1978 et le triomphe de Johan de Muynck sur le Giro. Le Slovène, qui briguait, lui, un quatrième maillot rouge de rang, avait dû jeter l’éponge avant la 17e étape, affaibli par une chute survenue, la veille, à 100 mètres de l’arrivée. Au moment de son abandon, Roglic était deuxième du général à moins de deux minutes d’Evenepoel.

Leur opposition, quelques mois plus tard, sur le Tour de Catalogne n’a livré son dénouement que l’ultime jour de course. Le 26 mars, maillot arc-en-ciel sur le dos, le Belge avait franchi la ligne le premier à Barcelone. Mais c’est bien le natif de Trbovlje qui s’est, cette fois, offert le sacre, devançant son rival de 6 petites secondes au général, après une semaine où les deux coureurs ont comme privatisé la course centenaire – deux victoires d’étapes chacun sur les sept disputées, et des places d’honneurs.

« Une course de trois semaines, c’est dans son ADN »

L’édition 2023 du Giro est d’autant plus alléchante que les deux coureurs ont pu faire le plein de confiance depuis le début de l’année. « Mes résultats probants à l’UAE Tour [1er], au Tour de Catalogne [2e] et à Liège [1er] montrent que je suis en forme », a ainsi fait valoir le Belge auprès de quelques médias, avant de quitter la Costa Blanca espagnole pour les Abruzzes italiennes. Remco Evenepoel en est convaincu : il est « plus fort qu’à la Vuelta ». « J’ai plus de réserves, plus de force dans les jambes, j’ai plus travaillé le contre-la-montre aussi. »

Primoz Roglic, de son côté, n’a pris part qu’à deux courses en 2023. Mais il les a remportées toutes les deux : Tirreno-Adriatico, début mars, avec trois victoires d’étapes, puis le Tour de Catalogne, quelques jours plus tard.

Le Slovène a aussi pour lui son expérience des courses de trois semaines. Samedi, sur la Costa dei Trabocchi Tudor, il prendra le départ de son douzième grand Tour, contre seulement trois pour son rival belge. Reste que « Remco a toujours parlé de grands Tours », confiait son père, Patrick, ancien coureur professionnel lui-même dans les années 1990, au journal Le Soir, le 5 septembre 2022 en marge de la Vuelta. « C’est son défi. Il a gagné des classiques [des courses d’un jour], mais une course de trois semaines, c’est dans son ADN. »

Le jeune Belge a déjà disputé le Giro, en 2021, mais il revenait alors de la grave blessure qui a failli lui coûter la vie le 15 août 2020 après un virage mal négocié dans la descente du mur de Sormano, sur le Tour de Lombardie. Il avait jeté l’éponge avant la 18e étape, à trois jours de l’arrivée, jugée, cette année-là, à Milan.

Pour cette 106e édition du Giro, le gamin d’Alost pourra compter sur des équipiers entièrement dévoués à sa quête du maillot rose. Chose rare, la Soudal Quick-Step, qui compte pourtant dans ses rangs deux des meilleurs spécialistes du peloton – Fabio Jakobsen et Tim Merlier –, n’a sélectionné aucun sprinteur pour ce Tour d’Italie, préférant miser sur des grimpeurs et des rouleurs pour épauler son phénomène. « Une équipe très solide », se félicite l’intéressé.

La Jumbo-Visma diminuée par le Covid-19

L’armada batave de son rival slovène a, elle, vu ses plans contrariés par le Covid-19. Robert Gesink et Tobias Foss ont dû déclarer forfait, remplacés par Jos van Emden et Rohan Dennis… Avant que le premier ne soit, lui aussi, contraint de renoncer pour les mêmes raisons. « Ce n’est pas l’idéal, ce n’est pas l’équipe que l’on imaginait au départ, mais ces choses arrivent et il faut s’adapter, a reconnu Primoz Roglic en conférence de presse, jeudi 4 mai. A la fin, notre mission reste la même. »

Mais le Tour d’Italie est une course exigeante, entre sa météo souvent capricieuse, sa haute montagne – cette édition compte sept arrivées au sommet, pour un dénivelé positif global de 51 400 mètres – et ses trois chronos au programme – avec 70 kilomètres au total. Et l’incertitude du podium final y est une habitude : l’an passé, l’Australien Jai Hindley (Bora-Hansgrohe) avait créé la surprise en terminant avec le maillot rose à Vérone, reléguant le grand favori, l’Equatorien Richard Carapaz, à la deuxième place.

Remco Evenepoel et Primoz Roglic sont « à coup sûr les deux coureurs les plus forts au départ », a reconnu le Gallois Geraint Thomas, auprès du site spécialisé néerlandais Wielerflits. Mais, avertit le vainqueur du Tour de France 2018, le niveau du peloton incite à la méfiance. Il faudra attendre le 28 mai et l’épilogue au pied du Colisée, à Rome, pour savoir si Remco Evenepoel est aussi doué en pronostics que sur un vélo.

Source: Le Monde